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Je cheminais sous l’ombre amie,
Seul, libre et l’âme épanouie ;
J’aperçois au bout du sentier
Une jeune fille endormie.
Assise sous un églantier.

Une lyre est sur sa poitrine ;
Le gazon à peine s’incline
Sous le poids de son corps charmant.
Que la brise errante dessine
Sous les plis de son vêtement.

Elle est blonde, elle est jeune et belle.
Doucement je m’approche d’elle.
Je prends sa main pour l’éveiller ;
Elle entr’ouvre un peu sa prunelle
Et n’a pas l’air de s’effrayer.

Sur ses traits divins rien d’austère.
Son œil, doux comme une prière.
Abonde en regards ingénus ;
Sa joue est pâle, et la poussière
A terni ses petits pieds nus.

Son visage est celui d’un ange ;
Une mélancolie étrange
En voile la chaste douceur.
Et son sein, rond comme une orange,
Tressaille du bruit de son cœur.

Autour de son front qui se penche,
Sur son épaule rose et blanche
Ses cheveux viennent se boucler.
Mais de ses yeux bleu de pervenche
Des pleurs semblent prêts à couler.

« Que fais-tu là sur l’herbe verte ?
Pourquoi cette robe entr’ouverte ?
Pourquoi venir avant le jour
Dans cette campagne déserte ?
Ma blonde enfant, est-ce l’amour,

« Est-ce une amoureuse souffranc
Qui te fait chercher le silence
Et des bois l’asile écarté ?
Le printemps chante l’espérance ;
Pitié, vierge, pour ta beauté ! »

Sur ses lèvres, un doux sourire
Passa, mais je ne saurais dire
S’il fut triste ou s’il fut joyeux ;