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première dynastie comprenait donc sept rois et aurait eu une durée de 225 ans[1]. Sous Zinzerus ou Chinzir, vers le XVIe siècle avant notre ère, une invasion de pasteurs arabes, analogue à l’invasion des Hycsos de l’Égypte et à la conquête arabe sous les successeurs de Mahomet, s’empara de la Babylonie, dont les peuples étaient tombés dans la mollesse. Ninive et les Assyriens, plus aguerris et mieux défendus, résistèrent aux conquérans, qui ne purent es soumettre. Loin de là : trois siècles plus tard, un roi d’Assyrie, du nom de Bélus, attaqua les Arabes, amollis à leur tour par les délices de Babylone, les chassa et réunit cette ville à son empire. C’est alors que Babylone fut la tributaire de Ninive et la seconde capitale de l’empire assyrien.

Ninus, fils de Bélus, agrandit cette dernière ville, à laquelle il donna son nom. Sémiramis, sa femme, se passionna de son côté pour Babylone, nouvellement conquise, et par ses fondations lui donna une nouvelle splendeur. A en croire les historiens grecs, cette reine aurait construit des murs qui avaient 365 stades de circuit, des quais, des ponts, une galerie, espèce de tunnel qui passait sous l’Euphrate, un lac qui servait à la décharge de ce fleuve, des pyramides à degrés ou jardins suspendus, enfin tous ces ouvrages qui, après plusieurs siècles, excitaient encore par leur grandeur l’admiration d’Alexandre et de ses soldats. Néanmoins un fait positif, et auquel les travaux de la mission de Babylonie donnent un haut degré de certitude, contredit formellement les spéculations auxquelles les historiens se sont livrés sur ces anciennes époques historiques. On est autorisé, d’après ce fait, à reléguer les exploits et les travaux de Sémiramis au rang de ces contes dont les Orientaux, amis du merveilleux, sont si prodigues. La plupart des briques trouvées à Babylone même, parmi les ruines des principaux édifices de cette ville et dans toute la contrée environnante, de Bagdad au Birs-Nimroud, portent l’estampille de Nabuchodonosor II.

On se rappelle le songe de ce prince expliqué par Daniel, et sa folie, quand, se croyant transformé en animal, « il mangea du foin comme un bœuf, et que son corps étant trempé par la rosée du ciel, les cheveux lui crûrent comme les plumes d’un aigle, et les ongles comme les griffes d’un oiseau[2]. » Cette folie de Nabuchodonosor dura sept années, pendant lesquelles sa femme Amuthis ou Nitocris, princesse originaire d’Ecbatane, dans la Médie, prit les rênes de l’empire. Les femmes sont extrêmes en tout, dans le bien comme dans le mal ; Nitocris, pendant sa régence, fit preuve d’une activité prodigieuse et déploya les talens d’une grande reine : aussi Hérodote, qui se passionne assez aisément, nous semble-t-il avoir dépouillé Sémiramis d’une partie de son prestige en faveur de sa brillante rivale. Quoi qu’il en soit, Nitocris sut gouverner avec autant de modestie que de gloire et de bonheur. Nous ne rencontrons en effet son estampille sur aucune des briques qui appartiennent aux monumens qu’elle a fondés, mais toujours la marque du malheureux époux au nom duquel elle régnait. Ces briques marquées au

  1. M. Oppert, l’un des membres de la mission qui dans ces dernières années a exploré la Babylonie, a trouvé et décrit un curieux vase qui paraît avoir appartenu à l’un des premiers monarques chaldéens.
  2. Daniel, ch. IV.