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de Pélops, — ces guérisons extraordinaires ont presque toutes la même origine. L’esprit, fortement impressionné, réagit sur les organes et sur les parties malades; la foi, en un mot, détermine la guérison. C’est une cause identique qui a communiqué parfois une vertu médicale à l’attouchement d’amulettes ou à la récitation de certaines paroles. Des charlatans, Yalentin Greatrakes, Gassner et Cagliostro, opéraient aussi leurs cures merveilleuses grâce à la crédulité de leurs cliens. Au moyen âge, il y avait plusieurs églises qui se disputaient l’honneur de posséder la robe sans couture du Sauveur, les clous qui avaient servi à son crucifiement, la tête, le fémur droit ou tel autre os d’un saint. Eh bien ! ces reliques contradictoires, et dont les unes étaient nécessairement fausses, n’en produisaient pas moins toutes également des guérisons miraculeuses. Marsile Ficin rapporte que certains malades furent guéris en touchant des ossemens d’animaux que l’on donnait pour des reliques; Pierre Pomponat et Corneille Agrippa ont relevé des faits analogues.

Voilà donc un point établi : l’imagination fortement excitée peut agir sur nos organes, tantôt pour y développer des maladies, tantôt pour les guérir. C’est à l’ordre des maladies créées par l’imagination qu’appartiennent les affections bizarres nées sous l’influence du mysticisme chrétien. Quand l’imagination est vivement frappée, elle contraint, nous le répétons, tout l’organisme à se plier à ses créations; on concevra donc qu’elle soit capable d’imprimer sur une partie du corps, vers laquelle elle a concentré tout son effort, une marque, une espèce de plaie qui laissera ensuite une véritable cicatrice. C’est de la sorte que l’on a vu des individus s’imaginer en rêve recevoir des blessures, des coups, être frappés d’une maladie : le lendemain, à leur réveil, ou quelques jours après, sous l’empire de cette persuasion, des traces d’inflammation se montraient sur les parties de leur corps qu’ils supposaient avoir été atteintes. Les solitaires de la Thébaïde et quelques visionnaires faisaient voir sur leur peau les marques rougeâtres qu’avait laissées le fouet du démon ou de l’ange qui les avait châtiés. L’auteur d’un curieux travail sur la chorée, M. Hecker, nous apprend que les prétendues cicatrices laissées par les morsures supposées de la tarentule changent de couleur lors des accès nerveux. Le célèbre physiologiste Burdach assure que l’on vit un jour une tache bleue sur le corps d’un homme venant de rêver qu’il avait reçu une contusion à cet endroit. Lorsque les convulsionnaires prenaient au tombeau du diacre Paris la pose du Christ sur la croix, souvent leurs extrémités devenaient rouges, la paume de leurs mains s’enflammait, une sorte de stigmate passager accompagnait cette méchante parodie de la passion. La possibilité de faits de ce genre devient encore bien plus