J’ai vu parfois, au fond d’un théâtre banal
Qu’enflammait l’orchestre sonore,
Une fée allumer dans un ciel infernal
Une miraculeuse aurore ;
J’ai vu parfois, au fond d’un théâtre banal,
Un être qui n’était que lumière, or et gaze,
Terrasser l’énorme Satan ;
Mais mon cœur, que jamais ne visite l’extase,
Est un théâtre où l’on attend
Toujours, — toujours en vain, — l’Être aux ailes de gaze !
IX.
L’INVITATION AU VOYAGE.
Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble ;
— Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux
Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Des meubles luisans
Polis par les ans
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l’ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l’âme en secret
Sa douce langue natale.