Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 10.djvu/406

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

France, et favoriser tout ce qui pouvait être un obstacle à nos armées. Tranquille sur le Pruth, la Russie a pu concentre tous ses moyens d’action en Crimée. Les Russes ont fait, il est vrai, une pointe dans la Dobrutcha ; mais cela s’est trouvé être un malentendu, éclairci sans que l’armée autrichienne eût à s’en mêler. Et que disait-on récemment en Prusse par voie de récrimination et peut-être de raillerie ? On disait quel’Autriche était très belliqueuse lorsque tout semblait tendre à un arrangement, ce qui sous-entendait aussi qu’elle était plus pacifique lorsque la guerre paraissait redevenir une inexorable nécessité. — C’était très certainement une vengeance de la Prusse, troublée de ses mécomptes diplomatiques. Nous ne disons point ceci en effet pour diminuer la confiance que doit inspirer la décision de l’Autriche : la garantie de sa loyauté est dans son intérêt, dans ses engagemens, dans toutes les considérations de sa situation politique ; et si par malheur ces conférences qui ont lieu aujourd’hui à Vienne devaient encore une fois tromper les espérances de paix, l’Europe sortirait de cette épreuve aussi résolue qu’elle a été modérée, avec le faisceau serré de ses alliances et la disposition de toutes ses forces. L’Autriche elle-même entraînerait l’Allemagne, et nos armées seraient prêtes à renouveler, là où elles paraîtraient, ces exemples d’héroïsme qu’elles donnaient encore dans leur dernier combat devant Sébastopol, pendant la nuit du 22 au 23 mars. La Russie seule aujourd’hui peut écarter cette terrible alternative.

Queues que soient les perspectives que puisse ouvrir la solution si universellement attendue, rien ne peut mieux démontre aujourd’hui la persistance et l’intimité de l’alliance de la France et de l’Angleterre que le voyage de l’empereur et de l’impératrice à Londres. Ce voyage, qui va s’accomplir ces jours-ci, a été précédé en Angleterre de toutes les manifestations qui peuvent promettre au chef de l’état un accueil en harmonie avec les circonstances. Certes ce voyage où Napoléon III va se recentrer avec la reine Victoria donne la mesure la plus exacte du changement des choses en peu d’années. Si l’empereur part pour Londres, le corps législatif achève aujourd’hui même sa session, deux fois déjà prolongée. Le corps législatif a commencé ses travaux, il y a trois mois, en votant l’emprunt qui a eu une si grande fortune ; il les a finis en votant le budget. Une des principales lois soumises à ses délibérations, on le sait, est celle qui substitue l’exonération vis-à-vis de l’état au remplacement libre dans l’armée, et qui développe le système des réengagemens. D'autres lois discutées par le corps législatif n’ont pas moins d’importance : l’une modifie l’organisation municipale en fortifiant l’autorité administrative ; une seconde touche à l’institution des juges de paix, dont elle développe la juridiction dans le sens le plus favorable, en faisant intervenir de plus en plus la conciliation. Il en est qui créent de nouveaux impôts, et de ce nombre est celle qui établit une taxe sur les chiens. Il serait difficile de savoir ce que pourra produire cette taxe, d’autant plus que la matière imposable peut varier beaucoup et n’est point aisée à saisir. C'est là du reste le moindre objet de la loi, qui parait avoir principalement pour but de diminuer le nombre des chiens et par suite le nombre des accidens. C’est une loi contre le vagabondage des chiens. Le