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Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 10.djvu/505

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au-dessous de celui de la basse mer; 4° que le canal, principalement établi en vue d’une navigation intérieure, ne pouvait recevoir que des navires maritimes d’un très faible échantillon.


VII. — PROJETS MODERNES.

Quoi qu’il en soit des présomptions que nous venons de présenter sur le régime de l’ancien canal, un point du moins est hors de doute : c’est que les projets de canalisation de l’isthme conçus ou exécutés dans l’antiquité ou dans le moyen âge n’avaient d’autre destination que de mettre le Nil en communication avec la Mer-Rouge, qu’ils ne s’appliquaient par conséquent qu’à la navigation habituelle du fleuve, et que les caboteurs du plus petit échantillon pouvaient seuls pénétrer dans ceux de ces canaux qui ont été mis à fin. La question de la communication des deux mers par un canal disposé pour la grande navigation maritime n’a donc été ni résolue, ni même posée dans les temps anciens. J’ajouterai que, jusqu’en 1847, elle ne l’a pas été davantage, ainsi qu’on en peut juger par l’exposé que nous allons présenter des projets mis au jour dans les temps modernes.

Depuis le kalife Al-Mansour (767) jusqu’à l’expédition d’Egypte, il n’est plus question de l’isthme de Suez. Les opérations faites en 1799 par les ingénieurs attachés à cette expédition ont servi de base à tous les projets présentés depuis cette époque; les résultats de ces opérations étant erronés, ces projets pèchent par la base; aussi me bornerai-je à en indiquer les principales dispositions.

Le premier de ces projets, rédigé par M. Lepère, ingénieur en chef des ponts et chaussées, attaché à l’expédition[1], se divise en deux branches distinctes : la première, qui n’est que la reproduction de l’ancien canal, est dirigée du Nil vers la Mer-Rouge; la seconde, destinée à réunir le fleuve et le port d’Alexandrie, n’est autre chose que le canal d’Alexandrie, aujourd’hui le Mahmoudié, restauré et recreusé; la communication entre ces deux branches s’établit par les divers bras du Nil[2]

Cet énoncé suffit pour indiquer que ce projet ne s’applique qu’à une navigation intérieure à faible tirant d’eau. En effet, avec les dispositions indiquées par M. Lepère, et en admettant les cotes du nivellement de 1799, la saison de la navigation avec le tirant d’eau de 2 mètres eût duré à peine quatre-vingt-dix jours, et la tenue de 3 mètres tout au plus trente jours par an.

  1. Description de l’Egypte, t. II.
  2. Le canal de Moèze jusqu’au bras de Damiette, ce bras jusqu’au canal Faraouhnieb; ce dernier canal, la branche de Rosette jusqu’au canal d’Alexandrie.