Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 10.djvu/632

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

coups de mousquet dont on les saluait du haut du bastion de Notre-Dame. L’escalier les mena à la fois au corps de garde de la porte de la ville et au haut du rempart, où on ne les attendait pas si tôt, et l’on se battit pendant quelques instans. Leur premier soin, quand ils y eurent débouché, fut de tourner du côté de la ville une pièce de canon qu’ils trouvèrent sur le rempart, et de faire feu. Jaloux d’achever seuls ce qu’ils avaient si bien commencé, ils se gardèrent d’ouvrir la porte[1], et se bornèrent à recevoir des renforts au moyen de la passerelle. Dans le commencement, les mousquetaires seuls étaient admis à prendre ce périlleux chemin.

Par suite des circonstances que je viens de raconter, on voit que la plus grande partie de l’infanterie espagnole avait été prise dans les dehors, et que le même sort était échu aux bourgeois les plus braves, qui furent faits prisonniers dans le pâté comme dans une souricière. Quant à la ville, la plus grande confusion y régnait; le reste des compagnies bourgeoises se ralliait sur la place du Magistrat ou sous les ordres du marquis de Leyde, qui occupait une position à l’autre bout de Valenciennes; mais la porte d’Anzin et ses abords étaient déserts, le rempart de ce côté abandonné, le pont de la ville toujours levé, et l’on supposait qu’il se passerait encore quelque temps avant que les Français n’organisassent un moyen de traverser l’Escaut et d’abattre ce pont, ce qui permettrait aux assiégés un retour offensif et leur assurerait en même temps les moyens de défendre la porte d’Anzin. Ils avaient compté sans les mousquetaires, qui, en moins d’un quart d’heure, tournant cette porte, étaient descendus sur la Place-aux-Herbes, et se barricadaient en arrière du pont du Moulin[2]. Ils agissaient ainsi pour tenir en respect Un régiment de dragons, qui les chargea, mais dont ils firent le colonel, M. de Nandelspiech, prisonnier. On battait la générale partout, et les bourgeois se rassemblaient. La position de nos jeunes gens devenait critique; ils se trouvaient par le fait enfermés de tous côtés dans la ville ennemie. Alors ils occupèrent les maisons du faubourg, se mirent à tirailler des fenêtres, et firent si bien enfin, que Moissac eut bientôt l’honneur de recevoir une députation des bourgeois demandant à parlementer; il eut l’habileté d’échanger des otages et de jeter les premières bases d’une capitulation; le feu fut suspendu, et le maréchal de Luxembourg informé de l’état des choses.

Revenons pour un instant sur nos pas. Que se passait-il en arrière de notre colonne d’attaque ?

  1. Ce fut longtemps après que le maréchal de Luxembourg fut contraint de donner des ordres pour qu’on abattît le pont et sa bascule.
  2. Ce pont est sur un bras de l’Escaut, à une certaine distance dans l’intérieur de la ville.