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JOAQUIM


RECIT ES ALGARVES.





I

Sur la rive droite du Tage, à l’est de Lisbonne et le long de la route qui conduit à Santarem, se trouve le faubourg de Xabregas. C’est une interminable file de maisons éloignées les unes des autres, parmi lesquelles on distingue de grands couvens transformés en usines. La nouvelle destination de ces monastères ne leur a point donné un aspect plus gai. Au lieu de moines qui prient, ce sont des rouets et des bobines qui tournent et se dévident avec un bruit monotone. Derrière ces édifices s’étendent des enclos sans verdure que couronne une chaîne de collines crayeuses. On a beau s’éloigner de la ville, on ne rencontre rien de ce côté qui rappelle la campagne. Pas un chant d’oiseau ne vient égayer l’oreille du promeneur ; en revanche, on y éprouve un indéfinissable sentiment de mélancolie. Au bord du chemin viennent expirer les vagues du Tage, si large en cet endroit, qu’on aperçoit à peine les blanches maisons du village de Palmella, bâti au fond d’une anse sur la rive opposée. Les mouettes se balancent en troupes nombreuses au-dessus de cette vaste nappe d’eau, voltigeant comme des points blancs sur l’azur d’un ciel parfaitement serein. Les voiles des barques qui sillonnent le grand fleuve et se penchent hardiment sur les flots entraînent le regard vers les perspectives lointaines de l’Alemtejo. À ce vaste panorama