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sont pâles comme la mort ; elles se lamentent, elles sont toutes troublées, toutes confuses.

— O chère lune, quelle bégueule engeance que ces fleurs ! elles ont raison, j’ai commis une faute grave ; mais pouvais-je savoir qu’elles étaient là aux écoutes, lorsqu’enivré d’un amour brûlant, je causais avec les étoiles ?

XVIII.

Avec tes yeux bleus tu me regardes doucement, et moi je deviens si rêveur que je ne puis parler.

C’est à tes yeux bleus que je pense toujours ; un océan de pensées bleues inonde mon cœur.

XIX.

Encore une fois sous le joug est mon cœur récalcitrant, et toute sa vieille rancune s’est évanouie ; encore une fois, avec la brise de mai, de tendres sentimens se sont glissés dans mon cœur.

Soir et matin, je me promène encore par les allées les plus fréquentées, et sous chaque chapeau de paille je cherche à apercevoir ma belle bien-aimée.

Encore une fois au bord des vertes ondes, encore une fois sur le pont, je m’arrête….. Ah ! peut-être que sa voiture passera ici, et les regards bien-aimés rencontreront les miens.

Encore une fois, dans le murmure de la cascade, j’entends des avis salutaires, et mon cœur comprend ce que disent les blanches ondes.

Encore une fois, dans des sentiers qui s’entrelacent, je me suis perdu en rêvant, et les oiseaux dans les buissons se moquent du fol amoureux.

XX.

La rose embaume, — mais si elle sent les parfums qu’elle exhale, si le rossignol lui-même éprouve ce qui agite notre âme aux doux sanglots de son chant.

Je ne le sais pas. Mais la vérité nous attriste souvent, et lors même que la rose et le rossignol exprimeraient des sentimens qu’ils n’éprouvent point, un tel mensonge serait profitable, comme dans bien des cas.

XXI.

C’est parce que je t’aime que je suis forcé de te fuir, d’éviter ton visage… Ne te fâche pas ! Ton visage si beau, si serein, comment s’accorderait-il avec ma triste figure ?

C’est parce que je t’aime que ma figure est si pâle, si misérablement amaigrie… Tu finirais par me trouver laid ; je veux t’éviter… Ne t’irrite pas !