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ni d’ébauché. Eh bien ! si l’école anglaise, si notre école voulaient prendre conseil de l’école allemande, je nourris la ferme espérance qu’elles pourraient en tirer grand profit. Elles écriraient ce qu’elles indiquent, elles achèveraient ce qu’elles ébauchent, et comme elles possèdent des qualités de couleur et d’harmonie qui manquent à l’école allemande, elles gagneraient en précision sans rien perdre de leur éclat.

Dans cette rapide analyse, j’ai négligé à dessein tous les noms secondaires, ne m’adressant qu’aux noms éminens pour savoir où en est aujourd’hui le génie germanique. Malgré l’absence d’Owerbeck, j’ai dû tenir compte de ses œuvres. Malgré la mort récente de Danneker et l’absence volontaire de Schwanthaler, pour estimer l’état vrai du génie germanique, nous devons admettre ces deux noms illustres dans la discussion engagée. Danneker a traité avec une élégance remarquable plusieurs sujets de la mythologie païenne. Schwanthaler a élevé dans sa patrie plusieurs colosses qui offrent un aspect vraiment monumental. Nous aurions aimé à voir figurer dans l’exposition de Paris le modèle de la Bavaria, placée au Walhalla, et l’Ariane de Danneker. Ces deux maîtres ont une telle importance, qu’il n’est pas permis de parler de l’école allemande sans interroger leurs ouvrages. Il y a dans les sujets grecs traités par Danneker une chasteté qui manque trop souvent aux sujets de même origine traités chez nous par des ciseaux très habiles. Une nation qui peut offrir à l’Europe des peintres comme Cornélius, Owerbeck et Kaulbach, des sculpteurs comme Rauch, Danneker et Schwanthaler, tient à coup sûr une place considérable dans l’histoire de l’art contemporain. Avec les seuls élémens de discussion que nous fournit l’exposition de cette année, nous pouvons affirmer que le génie germanique n’est pas en décadence. Il est animé d’un désir ardent, il veut égaler les œuvres les plus élevées de la Grèce et de l’Italie. Il ne choisit pas toujours la route la plus sûre pour atteindre ce but glorieux; mais un tel désir est déjà un titre d’honneur. Ce qui me plaît, ce qui me charme dans l’école allemande, c’est une aspiration constante vers l’idéal. Si elle ne rencontre pas souvent la beauté vraie, du moins elle la cherche toujours. Si elle se méprend sur la manière de l’exprimer, elle ne la perd jamais de vue. Si elle ne possède pas le sentiment de l’harmonie linéaire, elle ne se contente pas de copier ce qu’elle voit. C’est un grand pas de fait sur la route de la vérité. Lui sera-t-il donné de saisir et de traduire l’élégance de la forme? Démentira-t-elle toute son histoire? Je ne suis pas disposé à le croire. Il est probable qu’elle demeurera fidèle à ses antécédens; elle a du moins renoncé à l’imitation prosaïque, telle que la