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appellent a secluded spot. À côte du village s’étendent les tourbières.

La différence entre les tourbières hautes et les tourbières basses, c’est que dans ces dernières, dès qu’on creuse le sol, on trouve l’eau. Dans les temps anciens, on commença par défoncer ainsi les terres stériles ou presque stériles ; mais bientôt, entraînés par les bénéfices que procurait l’industrie de la tourbe, les habitans bouleversèrent de fertiles prairies, des champs qui se couronnaient chaque année d’abondantes moissons. La Hollande perdait ainsi tous les jours de son territoire. Sur certains points, les excavations affaiblissaient même les digues élevées pour défendre le pays contre les chocs impétueux de la mer. La Hollande présentait alors l’étonnant spectacle d’un peuple jouissant d’un territoire déjà fort limité, et travaillant sans cesse à le détruire. Les plus belles campagnes que l’œil de l’homme eût jamais vues disparurent. Le gouvernement du pays se crut obligé de mettre un frein à ces dévastations de la terre. Nul ne put désormais attaquer son champ que dans certaines conditions et après avoir obtenu le consentement des magistrats. Des ordonnances furent publiées dans ce sens à plusieurs époques. Toutefois l’état n’osait pas restreindre suffisamment l’abus, intéressé qu’il était lui-même dans les ravages du sol par les bénéfices qu’il tirait des tourbières à titre d’impôts.

L’autorisation de creuser la terre étant obtenue, on conduit sur le théâtre de l’ancienne culture des hommes armés de bêches, et dont l’emploi est d’enlever la couche de terre argileuse qui sert de revêtement k la tourbe. Le propriétaire fait alors partager son champ en plusieurs longues bandes de terre qui seront successivement exploitées d’année en année. La bande qu’on se propose d’attaquer d’abord, et qui est d’ordinaire située sur la limite latérale du champ, est encore revêtue de l’herbe et des plantes qui y croissent ; ce voile de verdure disparaît bientôt sous les instrumens de fer : c’est ce qu’on appelle commencer la fouille. À Wateringen, la matière tourbeuse se trouve enfouie sous une couche d’argile qui a deux ou trois pieds d’épaisseur. Cette terre arable est relevée soigneusement avec la bêche et déposée sur une partie du champ ; lorsque la tourbe sera extraite et l’eau épuisée, elle deviendra la base de la culture renaissante. Cette préparation est un travail d’hiver. On creuse la terre et l’on met à nu la couche de tourbe pour exploiter la tourbière au printemps suivant. Une nouvelle série de faits industriels s’ouvre alors, ordinairement en avril ou en mai, et se termine vers le mois de septembre. Un ouvrier pourvu de grosses bottes imperméables descend dans l’eau, dont la présence s’est aussitôt révélée sous la couche d’argile. Armé d’une bêche particulière à ce genre de travail, il extrait les glèbes tourbeuses. Cet homme ne voit point ce qu’il fait ; il agit, comme on