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pas les honneurs : elles ont charge d’âmes. Que cette pensée soit et reste dominante, et si quelques sacrifices de temps et d’argent y sont attachés, que les compagnies sachent les faire à propos, en excès même, afin que le public ne puisse jamais douter sans injustice de leur bonne volonté et de leur désintéressement.

La locomotive n’est qu’une des formes de la machine à feu ; il y en a deux autres, la locomobile et la machine fixe. À propos des instrumens agricoles, il a été parlé, dans la Revue, des locomobiles et des services qu’elles rendent ; ma tâche en sera abrégée. C’est une industrie toute récente et qui s’annonce bien ; on y sent la vigueur et la sève qui accompagnent les débuts. La locomobile est une petite machine à Peu destinée à être transportée sur les lieux où elle doit fonctionner, c’est-à-dire d’un champ et d’un village à l’autre, comme un serviteur, qui vient accomplir sa tâche et se retire après avoir reçu son salaire. Elle peut être indistinctement employée, suivant la manière dont on l’accouple, au battage du grain, à la moisson, aux coupes du foin, à l’exploitation des bois, à l’épuisement des eaux et a l’irrigation ; le travail rural est son objet et son domaine. On a pu voir, dans le concours de Trappes, le rôle important qu’ont joué les locomobiles. L’initiative est venue d’Amérique et d’Angleterre, et il semble que nous ayons regagné le temps perdu ; l’exposition comptait plusieurs machines françaises, notamment celles de MM. Calla et Flaud, qui peuvent sans désavantage soutenir la comparaison avec les bons modèles de l’étranger. Le problème consiste en ceci : fournir la plus grande force sous le moindre volume possible. C’est à ces deux termes que nos constructeurs se sont attachés. En Angleterre, le poids des appareils est encore de 375 à 500 kilogrammes par force de cheval ; M. Calla est parvenu à réduire de beaucoup cette proportion, et il établit des locomobiles d’une force effective de 22 chevaux et d’un poids de 5,700 kilogrammes : M. Flaud est descendu plus bas encore. La dépense du combustible a été également amoindrie ; M. Calla ne consomme que deux kilogrammes et demi de charbon par cheval et par heure, tandis que, dans leurs meilleurs instrumens, les Anglais en consomment trois. C’est là pour les moteurs à feu un empire nouveau et qui ne sera pas le moins fécond : après avoir affranchi les ouvriers des villes des labeurs les plus ingrats, ils se portent au secours des ouvriers de la campagne, toujours les derniers auxquels on songe, et qui passeraient en première ligne si les services réglaient les rangs.

La série des machines fixes est très étendue, et occupait à l’exposition une place digne de son importance. Ce qui y frappe surtout, c’est l’application presque générale du principe énoncé plus haut, la substitution du mouvement de rotation au mouvement de va-et-vient.