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Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 12.djvu/283

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rendant les examens publics et en les faisant servir à ranger les candidats par ordre de mérite. Lord Goderich, qui soutient avec talent des opinions avancées, a vivement appuyé, et le système adopté pour le service civil de l’Inde lui a paru le vrai modèle à suivre. Le chancelier de l’échiquier a défendu l’ordre du conseil. Suivant lui, la réforme administrative se réduit à deux choses : améliorer l’organisation, et sous ce rapport l’investigation ordonnée par le dernier cabinet se continue, puis relever le personnel, et c’est le but du système de l’examen. La publicité serait inutile, car une partie de l’examen doit porter sur des épreuves écrites. L’ordre de mérite ou le concours lierait les mains au ministère et annulerait sa responsabilité. Impraticable pour les hauts emplois, il ne serait pas utile pour les emplois inférieurs. Les compagnies commerciales que l’on cite sans cesse n’en voudraient pas, et l’on n’y a eu recours dans le gouvernement de l’Inde qu’afin de restreindre la toute-puissance de la compagnie; l’expérience a justifié l’ordre en conseil.

M. Lyndsay et sir Stafford Northcote ont répondu : le patronage a de nouveau été dénoncé avec tous ses abus; mais c’est surtout M. Gladstone qui, sans précisément appuyer la motion, a décrit le mal dans toute sa gravité, et soutenu comme il sait le faire la nécessité de la réforme. Son discours et celui de son successeur, sir George Lewis, peuvent être regardés comme les deux meilleurs exposés contradictoires de la question, telle qu’elle reste pendante devant le parlement. Aussi lord Palmerston, qui ne pouvait garder le silence, a-t-il judicieusement remarqué qu’on était d’accord sur le but, en désaccord sur les moyens. Il a fait l’éloge des agens actuels de l’administration et l’éloge des examens en général; il a trouvé qu’il était fort difficile de poser une règle d’avancement qui s’appliquât à toute la hiérarchie et combinât les droits du mérite avec la durée des services, et il a conseillé de laisser expérimenter le système récemment établi; après quoi la question préalable a été adoptée à 140 voix contre 125.


VII.

Si l’on nous demandait maintenant ce que nous augurons de ces longs débats, il nous serait impossible de témoigner ni beaucoup de crainte ni beaucoup d’espérance. Il se peut qu’un de ces jours l’examen compétitif triomphe, et nous sommes assuré que la prérogative royale n’en souffrira pas. En France, les officiers de l’armée qui n’ont pas été soldats sont au fond nommés au concours, puisque c’est ainsi qu’on entre dans les écoles polytechnique et militaire. Qu’y perd le pouvoir du prince? Quand M. Royer-Collard, dans la mémorable discussion de la loi de recrutement de 1818, demanda que la loi décrétât le concours, on se récria, et à défaut de la loi l’usage lui a