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Au XVIIIe siècle, l’alchimie devint ou prétendit devenir la chimie. On fit des analyses nombreuses, et Bêcher, appuyé sur des raisonnemens et des expériences, démontra que le sel, le soufre et le mercure, considérés jusqu’à lui comme les élémens des métaux, étaient eux-mêmes des corps composés, et que toute matière provenait de la combinaison de trois substances auxquelles il donna le nom de terres : — la terre saline ou vitrescible, la terre grasse ou inflammable, la terre mercurielle ou volatile. Cette dernière substance existait en assez forte proportion dans les métaux et leur donnait l’aspect métallique. Des diverses combinaisons de toutes trois résultaient non-seulement les métaux, mais le bois, le verre, l’eau, etc. Bêcher avait remarqué en effet (et beaucoup de chimistes l’avaient vu comme lui) que tous les métaux, à l’exception de deux, l’or et l’argent, étaient altérés par le feu, et se transformaient sous son influence en une matière grise, blanche ou noire, qui n’avait plus rien de métallique. C’est à cela qu’on donnait le nom de terre. On croyait alors à une décomposition, on pensait que le métal avait perdu quelques parties de sa substance, sa terre mercurielle ou volatile suivant les uns, son phlogistique suivant les autres. Si l’or et l’argent n’éprouvaient pas cette altération, c’est que cette substance, qui est, pour parler comme les alchimistes, la quintessence de leur métallité, leur adhérait plus fortement, — et s’ils étaient moins fusibles que les autres, c’est qu’ils contenaient moins de terre inflammable, laquelle constituait presque à elle seule le métal liquide, le mercure. Que fallait-il faire pour rectifier ces idées? Tout simplement peser le métal avant et après la calcination, et la différence de poids aurait indiqué s’il avait gagné quelque chose, ou s’il avait perdu un de ses élémens. Cela parait fort simple assurément, car rien n’est plus facile que l’expérience de la veille, ni plus difficile que celle du lendemain. C’était pourtant une idée de génie. Lavoisier, qui la conçut, fit peut-être la plus grande découverte de la science moderne en observant que le métal pendant la calcination, loin de se dédoubler, avait absorbé la partie respirable de l’air atmosphérique, s’était oxydé, comme on dit maintenant, et que la chaux métallique était une combinaison du métal et non un de ses élémens.

En même temps, Dalton faisait passer de la métaphysique dans la chimie la notion des atomes, et l’idée de substance élémentaire devint parfaitement claire et accessible à tous. On admit que tous les métaux alors connus, et qui étaient au nombre de six, — or, argent, cuivre, fer, étain, plomb, platine, — et les cinq demi-métaux, — antimoine, bismuth, zinc, cobalt et mercure, — étaient des corps simples. On y ajoutait aussi l’arsenic, relégué depuis dans la classe