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à Lauderdale, son conseiller ordinaire, et après tout, elle ressemble plus à un discours qu’il ne faudrait. » Grand partisan de la vieille langue anglaise, il disait qu’il ne voulait pas se servir d’un mot qui n’eût l’autorité de Dryden. Quant au fond de l’histoire, l’esprit qui l’inspirait n’a rien d’équivoque. On a vu que, comme Chatham, comme Walpole, comme tout le monde, excepté la société française du XVIIIe siècle, il blâmait fort la politique de Hume, et il voulait annexer à son ouvrage, s’il le terminait, un examen de l’Histoire des Stuarts de l’illustre Écossais, qu’il accusait de partialité pour une dynastie de compatriotes. Ce n’est pas en ce sens que Fox pouvait être soupçonné, et l’on a cité cent fois l’arrêt qu’il a rendu contre les restaurations.

Son ouvrage n’a point cependant paru au niveau des espérances que le nom de l’auteur faisait concevoir. Quoique amateur très éclairé, très passionné des beautés de l’art, Fox n’était pas un habile écrivain ; il avait trop peu écrit pour acquérir cette expérience du métier qui simule le talent. Deux ou trois articles dans un journal oublié, the Englishman, qui paraissait en 1779, sa lettre aux électeurs de Westminster, son éloge du cinquième duc de Bedford, et son fragment d’histoire, voilà tout ce qu’il a fait. Il ne faut donc pas chercher un grand art dans son livre, mais on y doit reconnaître une réelle valeur historique. Il tenait à savoir le vrai, et il a donné l’exemple de s’en enquérir en remontant aux sources et en écrivant l’histoire sur pièces. La sincérité éclate partout dans son récit et dans ses jugemens ; un fonds de, bienveillance se montre dans sa justice, même dans son injustice, s’il en a quelquefois, et toujours on reconnaît la ferme intention de ne condamner qu’à coup sûr, et de tenir compte de toutes les circonstances avant de prononcer. Sa manière de juger n’est point implicite ; il examine, il discute en présence du lecteur, et son histoire attache la raison comme une discussion bien suivie. Tel nous semble le mérite de l’ouvrage de Fox, et l’on serait heureux d’avoir sur tous les grands événemens de l’histoire un essai pareil d’un pareil homme d’état.

C’est l’orateur qu’il aurait fallu faire connaître, et nous devons nous borner à le louer. Précisément parce que Fox était le véritable orateur politique, on citerait de lui plus de beaux discours que de beaux passages ; on admirait plus ses mouvemens que ses expressions ; Il parlait comme on agit, avec un but, pour un certain auditoire, en vue de certaines circonstances. Quoique profondément lettré, ce n’était pas un ouvrier en paroles. Son esprit n’était point spéculatif. Il avait si peu de goût pour l’abstraction, qu’en rendant hommage à Smith et en soutenant ses principes par instinct, il ne faisait aucun cas de l’économie politique. « C’était, dit un critique