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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 2.djvu/844

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Bucharest malgré une opposition prononcée et malgré une enquête sur sa conduite politique et administrative commencée par le commissaire ottoman Dervich-Pacha, arrivé peu de temps après Omer-Pacha à Bucharest, à la suite des plaintes portées par les boyards contre l’hospodar, plaintes que le serdar avait fait parvenir au divan. Omer-Pacha chercha, mais trop tard, à lutter contre le courant qu’il aurait pu si aisément arrêter dès l’origine par la digue la plus faible ; il s’absenta au moment de l’arrivée de l’hospodar, et refusa, malgré la demande du général comte Coronini, qui avait pris le commandement des troupes autrichiennes après le départ du baron de Hess, de rendre des honneurs militaires au prince Stirbey, parce que l’hospodar, disait Omer-Pacha, était sous le coup d’une enquête, comme accusé d’avoir manqué à ses devoirs envers son suzerain. Il revint cependant peu de jours après pour être témoin d’actes qui lui firent toucher du doigt les écueils où il s’était brisé. Le gouvernement valaque fut réorganisé, à quelques rares exceptions près, avec les élémens qui le composaient dans le bon temps du protectorat russe. Il suffisait d’être soupçonné de tendances favorables aux puissances occidentales ou de dévouement à la Porte pour être éconduit et tenu en dehors des affaires actives. Le désappointement fut profond, et Omer-Pacha chercha vainement à élever une faible voix : il n’était plus écouté. Il ne put même pas mettre un terme aux exigences des généraux autrichiens, qui prétendaient, pour les officiers et les troupes placées sous leurs ordres, à un traitement hors de proportion avec les ressources du pays qu’ils occupaient. À ces exigences se joignirent, dès l’entrée des troupes impériales et royales, les excès, les violences, les meurtres, qui ont ensanglanté Bucharest, Craïova, Tirgovisht, Focchiani, presque toutes les villes et les villages occupés par les Autrichiens en Moldo-Valachie.

Omer-Pacha s’indignait, mais il n’osait faire aucune observation ; il voulut cependant montrer qu’il était aussi en état de faire sentir sa puissance, et il demanda quelques explications au gouvernement valaque sur la rentrée en Valachie d’hommes notoirement compromis avec les Russes, et qui même les avaient suivis au-delà des frontières. En même temps un de ses lieutenans avait fait arrêter dans une petite ville de Moldavie des individus qu’il soupçonnait d’espionnage. Le serdar fut vivement admonesté pour avoir agi de la sorte, et le comte Coronini lui signifia, dans des dépêches écrites avec le sentiment de la domination, que l’Autriche avait pris de fait, en occupant les principautés, le rôle de la puissance protectrice, et que les autorités ottomanes n’avaient nullement le droit de faire des arrestations ou d’ordonner des expulsions dans les provinces danubiennes pendant que les troupes impériales et royales les occupaient. Le serdar se le tint pour dit. Malgré des réponses où il cherchait à sauvegarder