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fonction de monnaie. La compagnie aura toujours les moyens d’en maintenir le niveau et d’éviter toute fluctuation provenant des variations de l’intérêt. »


Nous avons cru devoir reproduire la théorie des obligations du Crédit mobilier, telle que M. Isaac Pereire l’a présentée dans son remarquable rapport de 1854. On aura observé que les explications de M. Isaac Pereire portent sur les deux catégories d’obligations, de nature très distincte, les unes à court terme, les autres remboursables à longue échéance, que la société de Crédit mobilier est autorisée par ses statuts à émettre. Nous regrettons même, pour le dire en passant, que les explications de M. Isaac Pereire n’aient point assez nettement distingué ces deux sortes d’émissions. Nous allons les examiner successivement, en commençant par les obligations à court terme ; mais avant d’en apprécier la valeur pratique, et pour mieux éclairer la discussion à laquelle elles peuvent donner lieu, nous demanderons à remonter au système économique duquel elles émanent.


Ceux qui se sont tenus au courant des doctrines économiques de notre époque sont frappés, en étudiant le système du Crédit mobilier, d’y rencontrer, au moins à l’état d’essai, la réalisation de théories exposées, il y a trente ans, par une école d’économistes qui laissera dans le mouvement industriel de notre époque des marques souvent très utiles, et en tout cas très sensibles, de son influence. Nous voulons parler de l’école saint-simonienne, et nous avons surtout en vue les travaux par lesquels elle a débuté avant d’aller échouer dans des tentatives de réorganisation religieuse et sociale. Le premier organe de cette école fut un recueil, le Producteur, qui parut en 1825 et 1826, et, chose curieuse, le premier article du Producteur fut consacré au projet de fondation d’une société commanditaire de l’industrie. M. Olinde Rodrigues y exposa bientôt des vues financières originales et très arrêtées ; mais l’écrivain qui développa les théories économiques de l’école du Producteur avec le plus d’ingéniosité et d’ensemble fut M. Enfantin. Pour donner une idée de la suite et de l’étendue avec lesquelles M. Enfantin présenta ses doctrines, il n’y a qu’à énumérer ses principaux articles sur les sociétés en commandite et anonymes, la baisse progressive du loyer des objets mobiliers et immobiliers, les banques d’escompte, l’organisation féodale et l’organisation industrielle, le système des emprunts comparé au système des impôts, la concurrence dans les entreprises industrielles, la circulation, les progrès de l’économie politique dans ses rapports avec l’organisation sociale. Nous regrettons que ces remarquables travaux n’aient point été réunis dans une publication particulière ; ils formeraient