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l’on a trouvé avec eux, dans les collines subhymalaïennes, des ossemens de chameau, ainsi que d’hippopotame et de girafe, animaux qui ne vivent plus qu’en Afrique. Les mammifères qui aujourd’hui n’habitent plus que des pays chauds vivaient alors en France et en Angleterre. Parmi les espèces découvertes dans les cavernes de ces deux pays, dix-sept sont aujourd’hui complètement anéanties, et nous ne les connaissons que par leurs ossemens fossiles ; parmi les autres, un grand nombre n’ont plus de représentans en Europe ; quelques-unes enfin ont disparu depuis le commencement même des périodes historiques, comme deux espèces de bœuf sauvage, et en Angleterre le renne et le loup, qui vit encore en France, mais qu’une guerre acharnée ne peut tarder à détruire complètement.

On avait cru pendant longtemps qu’il n’existait point de singes fossiles ; mais de nos jours on en a trouvé jusque dans la partie inférieure des terrains tertiaires : les premiers ont été découverts en Angleterre, et depuis on en a rencontré en France, dans l’Inde et le Brésil. À la fin de l’époque tertiaire, et par conséquent à une époque géologiquement très rapprochée de la nôtre, les singes vivaient encore en Angleterre à une latitude de 52°. Les singes fossiles de l’ancien monde et du nouveau continent présentent d’ailleurs, avec ceux qui habitent aujourd’hui les deux hémisphères, une analogie tout à fait frappante, et se distinguent par les mêmes caractères.

À l’époque diluvienne, l’Europe avait une faune qu’on pourrait presque nommer asiatique. Ces deux continens n’étant pas, à proprement parler, séparés, cette identité n’a rien de trop extraordinaire ; mais il est digne de remarque qu’alors comme aujourd’hui on ne peut tracer aucune limite zoologique tranchée entre l’Europe et l’Afrique. Les animaux que l’on trouve encore de nos jours au nord de l’Afrique, le loup, l’hyène, le porc-épic, le singe commun, le chameau, vivaient tous autrefois dans le midi de l’Europe.

La même faune, sortie sans doute primitivement de l’Asie, s’est étendue tout autour du grand bassin méditerranéen, qui possède ainsi zoologiquement le même caractère qu’il a eu dans l’histoire des peuples. Il est bien digne aussi de remarque que des trois grands centres d’évolution animale, qui sont l’Australie, le nouveau et l’ancien continent, c’est celui où le développement des formes organiques a été le plus élevé qui a été aussi le théâtre des premières tentatives et des plus nobles conquêtes de l’esprit humain.

Dans cet examen rapide du développement des formes organiques, je n’ai parcouru que les régions les plus explorées de la nature animale, et je n’ai pu m’arrêter en quelque sorte qu’aux points culminans ; mais à cause de cela même on saisira peut-être avec plus de facilité, à l’aide de quelques traits fortement accentués, le plan général