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Forcé de renoncer à la politique de neutralité, il s’engagerait contre, jamais pour la Russie ; les députés devaient transmettre cette ferme assurance à leurs commettans et l’opposer au langage de ceux qui avaient tenté de rendre suspecte la conduite du gouvernement. »

Le traité autrichien du 2 décembre 1854, qui suivit immédiatement cet épisode, était-il connu d’avance du roi Oscar et l’encourageait-il dans ses dispositions ? C’est possible et même probable. Bien que le gouvernement suédois n’eût pas encore à Vienne l’habile baron de Manderström, dont la nomination n’est que du 30 mai 1855, son représentant jouissait d’un grand crédit auprès de cette cour, qui, nous l’avons indiqué, avait accueilli avec empressement et approbation la déclaration de la neutralité suédoise.

L’accession du Piémont à l’alliance occidentale d’une part, l’ouverture des conférences de Vienne de l’autre (26 janvier et 16 mars 1855), ne pouvaient qu’encourager également, bien que par des raisons fort diverses, le roi Oscar à persister dans ses premiers desseins. Dans le courant du mois de mars, le Times publia un article de correspondance, daté de Stockholm 27 février, écrit, nous croyons le savoir, sous l’inspiration du roi, et contenant les réflexions que le cabinet suédois pouvait souhaiter de proposer à l’examen des cours de l’Occident. « Pour tout esprit éclairé, y disait-on, il est évident que l’équilibre de l’Europe et la paix future du monde courent un égal danger du côté de la Baltique et aux embouchures du Danube. Le seul moyen d’arrêter les envahissemens moscovites est d’établir dans le Nord une puissance assez forte pour résister à tout essai de conquête ou même d’intimidation. Ce n’est pas des opérations sur la Mer-Noire toutes seules qu’on peut attendre une solution complète à la question d’Orient. » Quelques jours après la publication de cet article, des ouvertures étaient faites aux Tuileries directement, en dehors de toute voie officielle ; M. Lallerstedt désigne dans son livre la personne qui fut chargée de les poursuivre ; il dit comment la continuation des opérations en Crimée, devenues si importantes, fit ajourner les entreprises dans la Baltique et par conséquent la négociation : nous lui laissons la responsabilité de ces dernières assurances, mais il faut reconnaître qu’elles concordent bien avec nos premières informations.

Pendant ce temps-là, sauf les deux communications du roi au vice-président des bourgeois et au comité secret de la diète, le gouvernement suédois n’avait rien laissé transpirer au dedans des résolutions ou des tentatives de sa politique extérieure. Dans cette incertitude, le pays commençait à ressentir quelque anxiété, et les journaux semi-officiels, les journaux complaisans, croyant deviner les intentions secrètes du roi, répétaient à satiété que la navigation