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hausse, soit de revendre les valeurs qu’elle avait achetées dans l’espoir de la hausse, et par la elle aggrave la baisse. C’est alors que, si elle ne veut pas se tenir pour battue, et si elle persévère dans ses appréciations générales sur l’avenir prochain du marché, elle a retours, pour continuer ses opérations jusqu’à une autre liquidation, à la combinaison des reports que nous avons expliquée. Si le prix des reports est insignifiant, la spéculation est encouragée dans ses tendances et persiste dans sa situation. Si le prix de ces crédits est très élevé, s’il impose des charges trop lourdes à la spéculation, il faut qu’elle s’exécute et se liquide en réalisant ses pertes. Il est inutile d’ajouter que la spéculation choisit de préférence, pour objet de ses opérations, les valeurs qui sont les plus sensibles aux variations de hausse et de baisse.

À ceux qui vendent et achètent pour sortir sérieusement des va leurs et y entrer réellement, à ceux qui achètent et vendent avec de l’argent et avec des titres pour réaliser sans risque et à leur heure des différences, à ceux qui spéculent sur la hausse ou la baisse, resserrés entre les limites de deux liquidations, mais qui se livrent à ce jeu avec suite et qui en connaissent et qui en appliquent toutes les combinaisons, viennent s’ajouter les spéculateurs d’occasion. Le nombre de ceux-ci s’est aussi considérablement accru dans ces derniers temps. On a un renseignement poétique, on croit qu’il est de nature à faire monter ou baisser la rente ; on achète ferme ou à prime, ou l’on vend une certaine quantité de rentes pour gagner une différence sur la hausse ou la baisse à laquelle on s’attend. On est informé qu’une fusion se prépare entre tels et tels chemins de fer ; les actions de ces chemins devront monter lorsque la fusion sera connue du public, on achète un certain nombre de ces actions pour les revendre et gagner une différence quand le mouvement de hausse se produira. Dans le langage pittoresque de la Bourse, ces spéculations accidentelles s’appellent des coups de pistolet. Ces coups de pistolet sont devenus à la mode dans les rangs les plus divers de la société. Une nuée de petits spéculateurs prend son élan lorsqu’on croit qu’un incident politique pourra se traduire en mouvement de bourse. Les grands spéculateurs se rient ordinairement de ces petits joueurs, que l’on a vus pendant la dernière guerre si empressés à escompter les évolutions de la diplomatie. « La diplomatie à la Bourse, c’est 3,000 francs de rente, » disait un homme d’esprit en se moquant des petits enjeux que viennent risquer ces intrus sur la foi d’une nouvelle. Cependant ces spéculateurs d’occasion sont quelque fois très incommodes aux spéculateurs de profession. Pour ceux-ci, les jeux de bourse sont une science et un art ; ils tiennent compte à la fois, dans leurs opérations, de tous les élémens qui peuvent influencer