même, des adresses de félicitation affectueuse. Le roi de Prusse, le premier des souverains protestans du continent, l’ancien et naturel allié de l’Angleterre, était venu à Londres comme parrain du jeune prince. Il assistait à la séance royale. Quoique fortuits et passagers, les incidens heureux, les élans de joie publique profitent au pouvoir qui les voit naître. Après un débat de pure forme, les adresses en réponse au discours du trône furent votées, dans l’une et l’autre chambre, sans aucun dissentiment. Elles annonçaient que des mesures seraient incessamment proposées pour le rétablissement de l’équilibre entre les dépenses et les revenus de l’état, pour la révision du tarif des douanes, des lois sur les grains, sur les banqueroutes, sur l’enregistrement des listes d’électeurs, sur la juridiction des cours ecclésiastiques, et pour apporter à la détresse de certains districts manufacturiers tout le soulagement qu’on pouvait attendre de la législation. Toute hésitation et toute lenteur cessèrent en effet dans la marche du cabinet ; il mit immédiatement les chambres à l’œuvre, et pendant plus de six mois, du 3 février au 12 août 1842, sir Robert Peel fut constamment sur la brèche, soit pour exposer et discuter ses plans sur les grandes questions à l’ordre du jour, soit pour faire face à toutes les attaques de l’opposition et à tous les incidens du gouvernement.
Le moyen qu’il adopta pour remettre l’équilibre dans les finances de l’état, l’établissement d’une taxe (income-tax) sur tous les revenus fonciers, mobiliers ou professionnels, au-dessus de 150 liv. sterl. (3,750 fr.), rencontra une forte opposition, et n’a pas cessé d’être, surtout en France, parmi les économistes et les financiers, l’objet de critiques aussi vives que les inquiétudes qui les inspirent. Dans un temps aussi enclin que le nôtre aux passions démocratiques, je devrais plutôt dire aussi craintif devant leurs prétentions ou leurs attaques, un impôt qui ne frappe que les classes riches, et n’excite ainsi point d’effervescence populaire, est trop tentant pour qu’on n’en redoute pas l’abus. L’assiette de la taxe sur les revenus est de plus évidemment sujette à une incertitude, à une inquisition, à un arbitraire, à des fraudes qui la rendent particulièrement suspecte et désagréable. Ces objections sont moins fortes en Angleterre qu’elles ne seraient ailleurs. Il y a là, dans toutes les carrières où s’exerce l’activité humaine, beaucoup plus de grandes fortunes faciles à connaître et à atteindre. Les garanties de légalité, de liberté, de publicité, je dirai même de moralité dans les rapports des citoyens avec l’état, y sont plus sûres et plus efficaces. D’ailleurs la taxe sur les revenus n’y était pas nouvelle ; M. Pitt l’avait proposée et fait voter en 1798 au taux de 10 pour 100 ; sir Robert Peel ne demandait que 3 pour 100. Il tint absolument à sa demande ; c’était à ses yeux une question d’honneur national aussi bien que de prudence administrative. « J’ai acquitté