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qu’il gouvernerait encore mieux étant foi ; il le fut, et tout aussitôt possesseur paisible, nonobstant quelques parens incommodes, dont il se débarrassa selon les us de son pays.

Tandis que se formait sous sa direction en Macédoine une milice supérieure, pour la discipline et pour l’équipement, atout ce que le monde antique possédait alors, les institutions militaires de la Grèce présentaient le spectacle d’une rapide décadence. — Les dernières guerres entre Sparte et Thèbes avaient épuisé les deux nations. Sparte n’avait pu se relever des coups qui lui avaient été portés à Leuctres et à Mantinée. Privée d’Épaminondas enseveli dans son triomphe, Thébes avait encore des soldats vaillans et fiers de leurs exploits, mais il ne lui restait plus un général pour les commander. Elle avait recueilli pour, tout fruit de ses victoires la jalousie et la haine des autres républiques ses rivales, déchues maintenant de leur ancienne renommée. Athènes, quelque temps subjuguée, avait reconquis son indépendance, mais sans retrouver les forces et l’énergie qui l’avaient autrefois placée à la tête des peuples helléniques. Toutes les cités grecques, tour à tour dominatrices et accablées de revers désastreux, conservaient encore leur orgueil, leur ambition, leur patriotisme égoïste ; mais elles se méfiaient maintenant de la fortune, et toutes éprouvaient, une lassitude bien près du découragement. Partout les progrès du luxe, l’amour du bien-être, l’appât du gain qu’offraient le négoce et l’industrie avaient notablement affaibli leurs dispositions belliqueuses.

On sait qu’aucune république grecque n’avait d’armée permanente. Tant que les Grecs furent pauvres, ils firent la guerre avec résolution. Tous les citoyens s’exerçaient aux armes, et ils connaissaient à peine une autre profession. D’ailleurs, pendant assez long temps, les guerres ne furent que de rapides incursions où rarement on perdait de vue sa frontière. Lorsque des expéditions se hasardèrent dans le Pont, sur les côtes d’Asie, en Sicile, l’espoir d’un riche butin soutenait le zèle des citoyens enrôlés ; mais à mesure que l’art de la guerre se perfectionna, les campagnes devinrent plus longues, plus difficiles et moins profitables. En même temps l’industrie et le commerce avaient pris un grand développement. La fabrication d’objets de luxe ou de première nécessité, abandonnée autrefois à des étrangers ou à des esclaves, occupait alors beaucoup d’hommes libres et de citoyens. La plupart des Athéniens riches possédaient des fabriques ; le père de Démosthènes, par exemple, en dirigeait deux assez considérables. Pour la génération nouvelle, la guerre était de venue un mal bien plus grand qu’elle ne le paraissait aux contemporains de Périclès.

Cependant il y avait en Grèce un certain nombre d’hommes qui