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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/441

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suivante : Canzone di ringraciamento in modo lidico offerta alla Divinità da un guarito (hymne de reconnaissance dans le mode lydien, adressée à la Divinité par un convalescent). Après le grand trio dédié à l’archiduc Rodolphe, pour piano, violon et basse, qui a été fort bien exécuté, surtout par M. Ritter, on a terminé par le quatuor en la mineur, qui annonce la transition de la seconde manière de Beethoven à la troisième, comme l’a remarqué judicieusement M. de Lenz. À la troisième séance, nous avons entendu le quatuor en fa (opéra 134), qui est pour nous, humble mortel, un dernier éclair du génie pâlissant de Beethoven. Si on extrait de ce morceau laborieux et d’une compréhension si difficile quelques pas sages de l’épisode à deux quatre, il ne reste guère qu’un chaos musical. Grâces soient rendues cependant à MM. Maurin et Chevillard pour nous avoir débrouillé et fait comprendre ce mythe des derniers quatuors de Beethoven, source troublée où sont allés puiser tous les mauvais musiciens qui ont voulu se partager l’empire d’Alexandre ; mais les Richard Wagner, les Liszt, les Berlioz et même Schumann, qui est un artiste de vrai mérite, ne bâtissent que sur le sable, et seront la fable de l’avenir, comme ils le sont de la génération présente. Les portes de l’enfer, pas plus que les portes de l’Institut, ne pré vaudront contre la vérité.

Les séances de musique de chambre fondées par MM. Alard et Franchomme continuent d’attirer l’élite des amateurs. Elles offrent toujours un vif intérêt, qui tient autant à la perfection de l’exécution qu’au choix des morceaux très variés qui forment le répertoire. À la troisième séance, nous avons été ravi par un trio d’Haydn pour piano, violon et basse (opéra 33), dont le finale est une merveille de grâce, de clarté et d’élégance. Il n’y a de supérieur à ce morceau du père de la musique instrumentale que le quintetto en sol mineur, pour instrumens à cordes, de Mozart. L’andante con sordini de ce chef-d’œuvre est quelque chose de divin, de vraiment divin. La quatrième séance a été plus intéressante encore. Elle a commencé par le trio en mi bémol, pour piano, violon et basse, de Beethoven, dont Hoffmann a donné, dans la Gazette musicale de Leipzig, année 1813, une analyse qui est un chef-d’œuvre de critique fécondée par l’imagination. Le morceau a été rendu avec autant d’ensemble que de fini, surtout par le pianiste, le jeune Planté, dont nous avons eu occasion de parler ici même l’année dernière. Après le trio de Beethoven est venu le quatuor en sol, pour instrumens à cordes, de Mozart. Nous renonçons à louer comme il conviendrait l’andante du quatuor que nous venons de nommer. Si nous étions roi, prince, ou simplement millionnaire, nous nous ferions exécuter tous les soirs ce morceau de musique, en nous efforçant d’élever notre âme et notre esprit à la hauteur d’une inspiration sainte dont rien n’égale l’ineffable tendresse.

À côté des sociétés musicales dont nous venons de parler, il s’en est élevé une cinquième, sous la direction de MM. Lebouc et L. Paulin, qui s’est donné également la mission honorable d’interpréter les œuvres des maîtres. La Société de Musique classique et historique se distingue des précédentes par la grande place qu’elle accorde dans ses programmes à la musique vocale. Les quatre soirées qu’elle a données cette année, qui est la seconde de son existence, ont été brillantes et très suivies, grâce à la présence de Mme Viardot