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professeur à l’université de Leipzig, venait de publier la première partie : M. Danzel étant mort peu de temps après la publication de ce volume, M. Guhrauer s’est chargé de terminer l’œuvre, et il a eu à traiter toutes les questions qui se rattachent à la théologie de Lessing. Toutes ces études ont été recueillies avec une faveur qui doit encourager les écrivains. C’est surtout le groupe des philosophes allemands depuis Kant qui a été l’objet des recherches les plus attentives, et le livre de M. Erdmann n’est pas le seul où la philosophie insultée cherche à relever ses ruines. Seulement, tandis que M. Erdmann salue dans son maître Hegel la fin et le couronnement du travail inauguré par le penseur de Kœnigsberg, il en est d’autres pour qui le système de Hegel n’est qu’une déviation audacieuse, et qui retournent à Fichte ou à Kant pour reprendre sur nouveaux frais le travail interrompu. Telle est l’inspiration de M. Fortlage dans sa Genèse de la philosophie depuis Kant; M. Fortlage est un partisan de Fichte, comme M. Erdmann est un enthousiaste de Hegel. Plus loin, ce sont les disciples de Herbart, les amis de Jacobi, les continuateurs de Baader, qu’on retrouve fidèles à leur tradition, ou l’école un peu dispersée de Schelling, qui se rallie en ce moment même pour la publication de ses œuvres posthumes. Ces œuvres inédites de l’illustre chef de la philosophie de la nature se rattachent manifestement à la direction que nous signalons ici. C’est de la philosophie sous le patronage de l’histoire. Les œuvres posthumes de Schelling contiennent des études sur les religions antiques, et c’est dans cette forme concrète que l’illustre penseur symbolise ses propres théories sur les évolutions de l’intelligence humaine.

On voit ainsi renaître toutes les écoles qui se sont renversées l’une l’autre. Ne croyez pas cependant que ce soit là un signe d’impuissance ou de vaine curiosité; le symptôme commun attesté par ces travaux si différens, c’est le désir d’échapper à la fois et au scepticisme de Kant et aux conséquences pernicieuses qu’on a tirées, à tort ou à raison, des doctrines de Hegel. Les représentans de la philosophie hégélienne, à leur tête M. Erdmann, s’efforcent de prouver que les Bruno Bauer et les Feuerbach n’ont rien compris à la pensée du maître; les représentans des doctrines antérieures, alors même qu’ils semblent remonter jusqu’à Emmanuel Kant, proclament que le scepticisme du sage de Kœnigsberg ne saurait être qu’un point de départ comme le doute provisoire de Descartes. Ainsi le retour à la raison, un goût marqué pour l’histoire, une salutaire défiance du scepticisme, voilà les inspirations qu’il est permis de signaler dans le travail de la philosophie contemporaine.

Ces études sur la période de Kant à Hegel ont eu encore un autre résultat; elles ont mis en lumière des écrivains qui avaient passé