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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/560

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des votes de nos adversaires et de nos amis politiques est un fait grave. Pour nous qui répondons du gouvernement de cet empire, nous devons y résister de toute notre force, car, si nous l’acceptions, nous encouragerions des combinaisons semblables. Je ne pense pas que ce concours des votes ait été un fait accidentel, naturellement amené par le débat ; je puis me tromper, mais c’est mon impression qu’il y a eu un arrangement concerté d’avance entre quelques-uns de ceux qui nous attaquent et quelques-uns de ceux qui nous soutiennent… Je ne m’en plains point, je ne nie point le droit des honorables membres d’entrer dans de telles combinaisons, je ne condescends point à demander qu’on s’abstienne de tels procédés ; mais j’ai bien le droit d’examiner ce qui en résulte pour le gouvernement, pour ma situation comme ministre de la couronne… Je ne puis être insensible à ce qui s’est passé, dans le cours de ces deux sessions, pour nos travaux législatifs ; je ne puis m’empêcher de voir que plusieurs des mesures que nous avons proposées n’ont pas reçu, de toutes les personnes au caractère et aux opinions desquelles nous portons la plus profonde estime, un cordial et efficace assentiment, ce qui nous laisse dans une position peu enviable… Nous avons jugé utile aux grands intérêts du pays de relâcher le système de la protection commerciale et d’admettre, en concurrence avec certains produits de notre industrie, les produits de l’industrie étrangère. Nous nous sommes efforcés de concilier les principes que nous tenions pour vrais avec tous les ménagemens dus aux faits et aux intérêts actuels… Si nous avons perdu la confiance de ceux qui nous ont si longtemps et si honorablement soutenus, je le regretterai amèrement ; mais je ne puis solliciter aujourd’hui leur appui en leur promettant que nous adopterons je ne sais quelle marche intermédiaire et flottante. Je ne puis encourager des espérances que je ne suis pas prêt à réaliser. Je crois notre politique bonne. Je ne puis exprimer aucun repentir. Je ne puis me convertir à un principe différent. J’ai jugé cette déclaration nécessaire dans un moment où la résolution définitive de la chambre sur la question qui l’occupe peut avoir des conséquences graves. »

Quoique moins durement exprimée qu’elle ne l’avait été un mois auparavant à propos du travail dans les manufactures, la menace était claire, et la chambre s’en montra fort émue. Quelques-uns des plus sincères amis du cabinet, lord Sandon entre autres, se récrièrent, protestant qu’ils n’avaient nul dessein de se séparer de lui, qu’ils persistaient à l’approuver et à le soutenir dans sa politique générale, mais demandant, sur des questions secondaires, un peu plus de latitude pour leur jugement personnel. Le débat se prolongea en s’envenimant. Sir Robert Peel ne céda rien : comme lui, et