Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/597

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pela les grandes raisons qui avaient déterminé sa conduite, se félicita des résultats qu’il avait obtenus, remercia ses adversaires d’avoir loyalement accepté la décision du parlement sur des mesures qu’ils avaient eu plein droit de blâmer et de combattre, expliqua pourquoi il ne se permettait pas, dans la pensée de conserver le pouvoir, la dissolution de la chambre, et après avoir raconté en détail, avec une satisfaction amicale pour lord Aberdeen et des égards très bienveillans pour les États-Unis d’Amérique, la conclusion de l’affaire de l’Orégon : « J’ai accompli, dit-il, la tâche que m’imposait mon devoir public. Je n’ai rien dit, j’espère, qui puisse ranimer aujourd’hui des controverses que je désire écarter. Quoi qu’on puisse penser de l’étendue du péril dont nous menaçait la disette de l’un des principaux moyens de subsistance, je puis dire avec vérité qu’en proposant les mesures de politique commerciale qui lui ont enlevé la confiance de beaucoup d’hommes honorables dont il avait jusque-là obtenu l’appui, le gouvernement de sa majesté n’a été animé par aucun autre motif que le soin des intérêts du pays. Nous avons voulu le soustraire à des dangers que nous jugions imminens, et mettre fin à un conflit qui, dans notre conviction, aurait bientôt amené une collision violente entre les grandes et puissantes classes de cette société. Le désir de garder le pouvoir n’est entré pour rien dans nos propositions ; nous savions bien que, soit qu’elles réussissent ou qu’elles échouassent, elles auraient pour issue certaine la chute du cabinet. Peut-être convient-il à l’intérêt public que telle en ait été en effet l’issue. Il est naturel que beaucoup de nos amis nous aient retiré leur confiance. Quand des ministres proposent des mesures contraires en apparence aux principes qu’ils ont soutenus jusque-là, et s’exposent ainsi au reproche d’inconséquence, peut-être est-il bon, pour le pays et pour l’honneur des hommes publics, que cette conduite leur attire ce qui en semble le châtiment convenable, la perte du pouvoir. Je ne m’en plains donc point. Il vaut infiniment mieux perdre le pouvoir que le garder sans une complète certitude de la confiance de la chambre.

« J’ai dit naguère, et sincèrement, qu’en proposant nos mesures de politique commerciale, je ne voulais nullement enlever à d’autres le mérite qui leur en revient ; je dirai, pour les honorables membres qui siègent en face de moi, comme je le dis pour moi-même et mes amis, que ce n’est ni à eux ni à nous qu’appartient l’honneur de cette œuvre. Des partis en général opposés se sont unis, cette union et l’influence du gouvernement ont amené le succès de nos mesures ; mais le nom qui doit être et qui sera placé en tête de ce succès n’est ni le nom du noble lord qui dirige le parti dont nous avons eu le concours, ni le mien ; c’est le nom d’un homme qui, par des motifs très