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serait là rétrograder de la façon la plus fâcheuse; ce serait revenir à un état qu’on pourrait appeler en cette matière l’état de barbarie. Je veux seulement montrer comment les compagnies peuvent exciter des plaintes fondées par le jeu des tarifs, sauf à examiner tout à l’heure quelles peuvent être les garanties contre l’abus.

L’élévation excessive des tarifs offre un texte à des plaintes d’un autre genre, qui concernent les personnes aussi bien que les marchandises. Comme l’abaissement des frais de transport a pour résultat de faciliter les mouvemens, de multiplier les échanges, de développer les ressources sur chaque point du pays, il ne faut pas s’étonner si le public appelle les réductions de ses vœux les plus ardens. Sans doute les compagnies ne sauraient satisfaire à tous les désirs; mais on peut l’affirmer hardiment, pour produire tous leurs avantages, il faut qu’outre la célérité et la régularité des transports, les chemins de fer procurent toute l’économie compatible avec la juste rémunération des services rendus.

En sommes-nous là? Que les chemins de fer aient amené une diminution de dépenses comparativement au passé, c’est incontestable, et il n’est pas sans utilité de mesurer l’étendue de cette diminution. Pour le transport des personnes, la différence est beaucoup moins sensible que pour celui des marchandises. Reconnaissons cependant que les chemins de fer offrent dès à présent aux voyageurs des avantages marqués. Voici des chiffres relevés sur les contrôles des messageries. Pour aller de Paris à Lyon, avant l’établissement de la ligne ferrée, il en coûtait 64 francs dans le coupé, 54 francs dans l’intérieur, 46 francs dans la rotonde, et 42 francs sur l’impériale; le chemin de fer prend 56 fr. 80 cent., 42 fr. 60 cent., et 31 fr. 25 cent., suivant la classe des voitures. De Paris à Bordeaux, la moyenne des anciens tarifs était de 82, 70, 62 et 60 fr.; la compagnie d’Orléans perçoit 65 fr. 20 cent., Zi8 fr. 90 cent., et 35 fr. 85 cent. Encore un exemple : de Paris à Strasbourg, on payait 60, 50, 44 t 40 fr. ; on paie aujourd’hui 56 fr. 20 cent, 42 fr. 15 cent, et 30 fr. 90 cent. Si l’on compare le prix des voitures de 1re classe à celui du coupé des diligences, on voit que la différence est d’un peu plus de 13 pour 100 à l’avantage des chemins de fer. Entre l’impériale des diligences et les wagons de troisième classe, la différence est environ de 31 pour 100.

Quant aux marchandises, le prix de l’ancien roulage dépassait de plus de moitié le tarif des voies ferrées; il variait communément de 20 à 25 centimes par kilomètre et par tonne pour le roulage ordinaire; je ne parle pas du roulage accéléré, qui coûtait le double. La moyenne sur les chemins de fer descend notablement au-dessous de 10 centimes. Chaque ligne compte en outre des articles favorisés qui sont voitures à des prix très inférieurs. A vrai dire, il n’y a plus