Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/874

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étaient admises par le ministre du trésor. Cette admission avait exactement le caractère de ce qu’on nomme dans le commerce l’acceptation d’une lettre de change, car elle assignait une échéance fixe aux ordonnances. Pour Paris, c’était de dix jours à compter de l’acmission ; c’était de trente pour les ordonnances à payer sur le territoire de l’ancienne France, et de quarante lorsqu’il s’agissait de paiemens à faire dans des départemens plus éloignés.

Pour prévenir tout mécompte dans une comptabilité qui était si complexe, qui embrassait tant de détails, et pour empêcher les retards auxquels on n’eût que fort mal porté remède par des discussions épistolaires, car de celles-ci on ne voit jamais la fin, chaque mois et pour chaque ministère, le chef de la comptabilité venait personnellement faire la vérification de ses comptes avec ceux du trésor ; avec cette précaution, les anciennes controverses sur la situation des crédits n’avaient plus occasion de se renouveler.

Les services publics éprouvèrent ainsi une véritable amélioration. Les ministres, qui trouvaient le trésor constamment fidèle envers eux pour l’acquittement des ordonnances qu’ils avaient le droit de signer, usaient de leur crédit avec plus de modération, parce qu’ils obtenaient plus de confiance, et avec plus d’économie, parce que les conditions de leurs traités étaient moins onéreuses. Elles l’étaient encore beaucoup trop, par l’effet d’une cause qui ne pouvait disparaître qu’avec l’aide du temps : il fallait en effet une assez longue épreuve pour que les entrepreneurs des services ministériels fussent convaincus, et M. MoUien ajoute pour qu’ils s’amendassent, car ils n’appartenaient pas toujours à la classe la plus discrète sur le choix des profits. Le changement aurait été plus complet et plus prompt si les crédits ouverts par la loi de finances n’eussent été excédés par les dépenses réelles, ou si l’empereur avait consenti toujours aux crédits supplémentaires qui étaient réclamés pour le solde des dépenses. Malheureusement, on l’a vu, il cessait de s’offusquer de l’existence d’un arriéré lorsque les créances à solder étaient dues à des fournisseurs.

La paix de Tilsitt produisit, par les contributions auxquelles fut soumise la Prusse, des sommes bien plus considérables que la campagne d’Austerlitz. Indépendamment des réquisitions en nature, et de 16 millions pour frais de perception ou non-valeurs, le montant fut de 222 millions qui servirent à entretenir les garnisons placées dans les forteresses prussiennes après la conclusion de la paix, et de 295 millions qui devaient être versés dans la caisse du domaine extraordinaire, mais dont 155 seulement avaient été payés en 1814. Ces lourdes charges imposées aux peuples vaincus ne sont pas ce qu’il y a de plus recommandable ni de plus heureux dans les consé-