que leur organisation n’avait pas acclimatés d’avance ont toujours péri en Europe ; la phthisie les a invariablement emportés. L’homme seul peut braver impunément tous les climats, parce qu’il modifie son vêtement, son habitation, sa nourriture, et parce qu’il connaît l’usage du feu ; mais l’animal ne s’habitue pas plus à un climat que l’homme ne le ferait s’il voulait vivre nu et sans abri dans les régions septentrionales, comme il le peut impunément dans quelques contrées privilégiées des zones tropicales. Son intelligence, son industrie, l’ont rendu cosmopolite ; par son organisation, il ne l’était pas. Je n’ai garde de vouloir décourager les météorologistes, les botanistes et les zoologistes qui se livrent à des essais de naturalisation : on ne saurait trop les multiplier, et l’expérience prouve que les témérités mêmes ont souvent été suivies de succès. Quel est le botaniste qui aurait cru que l’agave d’Amérique, le lagerstrœmia et le nelumbo de l’Inde pourraient vivre dans le midi de la France, que le paon, la pintade et le kangourou s’accommoderaient de nos hivers ? Mais, tout en proclamant l’importance et l’utilité de ces tentatives, il ne faut pas abuser le public sur le but qu’on peut atteindre. Naturaliser des plantes et des animaux est possible ; les acclimater ne l’est pas.
À côté de ces questions d’un intérêt tout pratique, la géographie botanique en soulève d’autres d’un ordre essentiellement philosophique. Comment la végétation actuelle s’est-elle établie à la sur face du globe ? Chaque espèce était-elle originairement représentée par un seul individu, père de tous ceux qui existent actuellement, ou bien un certain nombre d’individus ont-ils paru simultanément sur plusieurs points ? En un mot, pour parler le langage des naturalistes, y a-t-il eu originairement des centres de création multiples et distincts d’où les plantes se sont répandues en s’irradiant, jusqu’à ce qu’elles fussent arrêtées dans leur migration par des conditions incompatibles avec leur existence ? A l’apparition de la végétation actuelle, la surface terrestre était-elle disposée comme aujourd’hui, ou bien la distribution des terres et des mers et le relief du sol différaient-ils de l’état présent ? Toutes ces questions et d’autres encore ont vivement éveillé la curiosité des botanistes et des géologues penseurs. Ces problèmes ne sont pas résolus, tous sont encore enveloppés d’obscurités ; mais la lumière commence à poindre. Ma tâche est de résumer en peu de mots le plus clair de nos connaissances sur ce sujet. Toutefois, avant d’arriver à l’apparition des végétaux actuels, je dois donner une idée de ceux dont les analogues n’existent plus, mais qui sont conservés à l’état fossile dans le sein de la terre. Grâce aux travaux de MM. Adolphe Brongniart, Alexandre Braun, Henri Goeppert, de Sternberg, Unger, Corda, Lindley, William Hutton, Schimper, Oswald Heer et Bunbury, la paléontologie