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tice à méconnaître les qualités qui, malgré tant de défauts, donnent de la vie au dernier ouvrage de M. Vollo. Que M. Vollo s’attache à concevoir un sujet plus simplement et surtout plus nettement, qu’il évite les longueurs, qu’il se défie de sa mémoire, qu’il écrive enfin d’un style plus clair, plus précis, plus châtié : il n’a pas moins à faire s’il veut répondre aux espérances de ses amis. Jusqu’ici a il fait du bruit, j’allais dire du scandale; des efforts persévérans et bien dirigés peuvent seuls lui assurer une solide et durable réputation.

On sait maintenant à quoi s’en tenir sur les auteurs dramatiques que l’opinion met au premier rang en Italie. Je me crois dès-lors dispensé de parler en détail de ceux que le public a moins remarqués, Mme Zauli-Sajani, MM. Liverani, Bensi, Guala, Villa, Sabatini, Gattinelli, Fambri-Salmini, Bellotti-Bon. Ai-je besoin de faire remarquer que tous les auteurs comiques de l’Italie vivent et écrivent dans les états du nord et du centre de l’Italie, c’est-à-dire à Florence, à Modène, à Turin, à Milan ou à Venise? dans les états de l’église, la comédie populaire a seule la parole. Quant aux Napolitains, malheureusement pour eux ils peuvent écrire, on les y encourage même; mais MM. Cuciniello, Mastriani, Ricci, qui tiennent la plume en ce moment, n’auront pas même, on peut le leur prédire, le succès relatif de l’abbé Genoino, du baron Cosenza, du duc de Ventignano, leurs devanciers immédiats. On a beau parler des entraves que le gouvernement et les mœurs du pays mettent à toute publicité : il n’en est pas moins vrai qu’avec la passion unitaire qui domine aujourd’hui en Italie, un auteur célèbre à Naples, s’il avait un mérite réel, ne demeurerait pas ignoré dans le reste de la péninsule.

Telle est donc l’histoire, telle est la situation présente du théâtre italien. Si l’on cherche dans le passé ce que pourra être l’avenir, on reconnaîtra que l’art dramatique traverse en ce moment, chez nos voisins, une de ces crises d’où il est déjà sorti plus d’une fois transformé. Attendons la phase nouvelle qui s’annonce, et gardons-nous, pour quelques jours d’engourdissement, de nier la force vitale. Non, cette nation italienne, si heureusement douée, ne manque pas du génie dramatique. La gloire d’Alfieri et de Goldoni protesterait au besoin contre cet injuste arrêt de l’opinion en France. Sans doute Alfieri descendrait du premier rang dans la patrie de Shakspeare, de Goethe ou de Corneille, et Goldoni, trop rabaissé peut-être hors de l’Italie, est trop exalté par des concitoyens intéressés à sa gloire; mais ils occupent tous les deux une place considérable dans l’histoire de l’art. Quant au peuple ingénieux qui comprend si bien leurs chefs-d’œuvre, que de son sein naissent à toutes les époques d’illustres ou d’habiles acteurs pour les interpréter, comment serait-il incapable de suivre la trace des maîtres? Que manque-t-il à l’Italie pour s’élever de l’interprétation à la création? N’a-t-elle pas