que le seul moyen d’empêcher le succès de M. Fremont était d’assurer à tout prix la majorité à M. Buchanan. Ce n’était pas en quelques semaines qu’on pouvait réunir des moyens d’action suffisans.
La campagne électorale est aujourd’hui terminée. Le 4 novembre 1856, a eu lieu dans tous les états la nomination des électeurs chargés de désigner le président : l’avantage est demeuré à M. Buchanan. La candidature de M. Fillmore a réuni un nombre de voix très considérable dans plusieurs des états du sud, notamment dans la Louisiane et dans la Floride ; elle n’a obtenu la majorité que dans un seul, le Maryland. M. Buchanan a eu pour lui tous les autres états à esclaves, deux des états du centre, la Pensylvanie et le New-Jersey, et un état de l’ouest, l’Indiana. Il a réuni ainsi 159 voix, c’est-à-dire 10 voix de plus que la majorité absolue ; peut-être y pourra-t-il joindre encore les 4 voix de la Californie. M. Fremont l’a emporté dans douze des états libres, parmi lesquels le New-York et l’Ohio, qui lui ont donné 125 voix. C’est l’élection la plus disputée qu’on ait vu depuis longtemps.
M. Buchanan est donc virtuellement élu, et le 4 mars 1857 il ira prendre possession de la Maison-Blanche. Quelles peuvent être les conséquences du choix que vient de faire le peuple américain, et quelle politique adoptera le nouvel élu ? Telles sont les questions qu’une irrésistible curiosité met aujourd’hui sur toutes les lèvres. Qu’on nous permette de dire brièvement notre avis. Nous ne croyons pas que l’élection de M. Fremont aurait eu pour conséquence une rupture de l’Union. Les états du sud auraient bruyamment manifesté leur alarmes et leur colère, des démonstrations séditieuses auraient eu lieu, les harangues incendiaires se seraient succédé tous les jours mais lorsque les meneurs auraient voulu passer de la menace à l’exécution, ils n’auraient trouvé qu’hésitation et froideur, et le premier homme de cœur qui se serait mis en avant pour prêcher le respect de la constitution et de l’unité nationale aurait en un instant rallié la foule autour de lui. Un des représentans de la Virginie au congrès M. Botts, homme de caractère et de sens, avait dit dans une réunion que le sud, malgré ses cris, subirait paisiblement l’élection de M. Fremont. Stigmatisé comme traître, pour ce propos, par le gouverneur de la Virginie, qui est un sécessioniste ardent, M. Botts, il n’y a que quelques semaines, n’hésitait pas à maintenir son assertion devant ses électeurs. « Les hommes du nord, disait-il, et M. Fremont le premier, ne veulent porter aucune atteinte à vos droits, ils n’ont aucune envie de se mêler de vos affaires et de vous empêcher d’être maîtres chez vous ; le nord veut limiter l’esclavage comme le sud veut l’étendre, chacun est dans son rôle naturel, et ce que chacun a de mieux à faire, c’est de se servir de la constitution et de