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masses immenses de marbres communs, d’un gris bleuâtre. Ces marbres forment la plupart des monticules d’Athènes ; le prix de transport est donc presque nul. En outre, on voit en un grand nombre de lieux des calcaires crayeux, blancs et tendres, qui fourniraient de très belles pierres d’appareil. J’ai constaté la présence de ces calcaires dans les plaines de Ménidi, de Carvati, de Traconès, à Marcopoulos, à Oropo, etc. Au Pirée et à la porte même d’Athènes, on les exploite. Bien que les matériaux de construction économique n’aient pas manqué aux Athéniens, ils ont cependant introduit peu de pierres de taille dans leurs habitations particulières. Ces habitations ont été construites légèrement, ainsi que le fait supposer l’absence de toute ruine.

Il est encore une circonstance dont on doit tenir compte quand on cherche à expliquer le caractère des édifices de l’Attique. Les bouleversemens géologiques ont donné naissance à de nombreux monticules qui ont fourni aux architectes des piédestaux naturels pour asseoir les temples. C’est ainsi que le Parthénon et les autres monumens de l’Acropole d’Athènes sont construits sur une éminence qui s’élève presque à pic au milieu de la ville ; les ruines de Rhamnus dominent la mer d’Eubée, et le temple de Sunium se dessine au sommet d’une haute falaise qui s’avance en pointe à travers les flots de l’Archipel. Les rochers, par leurs parois abruptes et irrégulières, contrastent avec la symétrie des colonnes doriques, ioniques ou corinthiennes qui les surmontent ; par leur élévation, ils compensent le peu de hauteur des temples grecs, qui semblent faire corps avec eux et en être le couronnement. Sans doute la Madeleine de Paris serait d’un effet plus imposant, si, au lieu d’être placée au niveau des maisons de notre grande cité, elle s’élevait sur une des collines qui la dominent. Encore ces collines sont-elles formées de matériaux grossiers, et la pente en est-elle peu rapide ; les monticules de l’Attique sont au contraire composés de marbre dont les découpures offrent tout à la fois de la hardiesse et de l’élégance.

La blancheur et le facile polissage des roches de la Grèce durent favoriser l’ornementation polychrome. La statuaire était connue depuis longtemps en Babylonie et en Égypte avant de parvenir en Grèce ; mais c’est seulement lorsqu’elle rencontra les marbres du Pentélique et de Paros qu’elle entra dans une voie de perfection. La translucidité des blocs invita le ciseau des artistes à les façonner ; quelle pierre fut jamais plus digne de représenter les dieux ?

Si les montagnes de la Grèce offrirent aux artistes des matériaux magnifiques, elles fournirent encore à leur imagination des types d’une admirable beauté. Rien de si gracieux et parfois de si majestueux que les paysages de la Grèce : ici des chaînes aux parois escarpées figurent des ruines, des tourelles, des pans de mur ; là des