une caravane de bœufs et de chevaux conduits par des nègres. Ne jugeant pas possible de traverser le désert, ils prirent dans l’est par le pays de Bamangwato, contrée sablonneuse et aride dont la chétive population végète dans une affreuse misère. Ce pays toutefois n’est pas absolument, comme le désert, dépourvu de végétation et de verdure ; les animaux sauvages qui l’habitent, élans, buffles, éléphans, girafes, y contrastent par leur puissante carrure avec le triste aspect de l’homme. Les rhinocéros seuls y paraissent rares. En quelques endroits, la nature, dans sa prévoyance, a remplacé par un végétal l’eau qui manque. Ce végétal bienfaisant est, au dire de M. Livingston, une petite plante qui ne sort de terre que de quelques pouces, et qui porte à un pied au-dessous du sol une racine assez grosse, de nature spongieuse, et pleine d’un liquide frais et pur.
Après plus d’un mois de marche, la caravane atteignit, à cent et quelques lieues de son point de départ, une belle rivière, dont la largeur variait de trente à cent mètres, et semblait se diriger de l’ouest à l’est vers la mer des Indes. L’eau froide et douce de cette rivière doit provenir de la fonte des neiges ; la crue a lieu au moment de la saison chaude ; les habitans ignoraient la cause de cette crue périodique, mais ils assuraient que ce n’est pas la pluie, et ils ajoutaient que, dans un pays situé plus loin vers le nord, il y avait un chef qui, chaque année, sacrifiait un homme et le précipitait dans la rivière, qui alors commençait à s’élever. Les voyageurs conjecturèrent que cette cérémonie barbare devait coïncider avec la fonte des neiges dans le pays montagneux où le fleuve prend sa source. Ce fleuve a reçu des indigènes le nom de Zougha. Les bords sont couverts d’arbres inconnus dont les fruits sont bons à manger, et de variétés énormes du baobab, ce géant de la végétation africaine que l’on retrouve sous l’un et l’autre tropique.
M. Livingston et ses compagnons voulurent remonter le cours du Zougha : c’est ainsi qu’ils arrivèrent à une nappe d’eau qui, à cette époque de l’année (fin juillet), fermait l’horizon. Une grande rivière semblable au Zougha, le Théogé, s’y jetait à l’extrémité nord-ouest, et faisait communiquer ce vaste bassin avec une série d’autres petits lacs plus septentrionaux. Tous, ainsi que les rivières, nourrissent des hippopotames et des crocodiles. La nappe d’eau au bord de laquelle l’exploration du Zougha avait conduit les voyageurs n’était autre que le lac N’gami.
Dans cette première excursion, les voyageurs ne pénétrèrent pas sur la rive septentrionale du Zougha ; mais il se trouva l’année suivante un autre explorateur, M. Oswell, qui, de 1850 à 1851, séjourna sur les bords de la rivière, la parcourut dans toute son étendue, de l’ouest à l’est, jusque vers un lac appelé Kummandow, près duquel elle aboutit après avoir traversé le N’gami, et se perd dans des étangs salés. Au printemps de 1851, M. Livingston rejoignit M. Oswell, et tous deux continuèrent de s’avancer dans la direction du nord. Ils arrivèrent dans un pays plat, boisé et habité par des tribus errantes de nègres. Ils y eurent particulièrement à souffrir de la piqûre du tsé-tsé, insecte singulier qui se trouve également au Soudan et sous la zone du tropique méridional. Sa piqûre, inoffensive pour les bêtes sauvages et pour l’homme, est mortelle aux animaux domestiques, hormis la chèvre. Il suffit de trois ou quatre de ces insectes pour tuer un gros bœuf ; l’animal blessé