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D’ailleurs, ainsi qu’il l’a fait voir, les perturbations qu’elles ont entraînées ont été généralement bornées à une étendue restreinte, à un dix-huitième environ de la surface terrestre. On comprendrait difficilement, en les ramenant à ces limites véritables, que les bouleversemens qui ont accidenté l’écorce du globe aient pu anéantir la population terrestre tout entière. Il n’est pas invraisemblable que ces crises aient été renouvelées plusieurs centaines de fois, et l’on s’effraie à la pensée que le cours de la vie animale ait été entièrement suspendu à de si nombreuses reprises. Au lieu d’expliquer comme M. Agassiz le progrès organique qu’il a cru reconnaître à travers les diverses périodes de l’histoire de la terre, beaucoup de naturalistes continueront à l’attribuer aux changemens qui se sont opérés dans les circonstances physiques à mesure que la planète a vieilli, et à quelque principe inhérent à la nature animée elle-même.

Telles sont donc les principales doctrines de M. Agassiz, ses vues sur les méthodes de classification naturelle, sur l’alliance de l’anatomie et de l’embryogénie comparées, sur la corrélation des faunes passées et de la faune actuelle. Il est encore un sujet sur lequel il est intéressant de connaître son opinion, nous voulons parler de la question tant débattue de l’unité ou de la diversité des races humaines. M. Agassiz l’a traitée dans un mémoire annexé à un ouvrage publié, il y a peu de temps, en Amérique : Types de l’Humanité, par MM. Nott et Gliddon. Son travail a pour titre : Esquisse des provinces naturelles du règne animal et de leur relation avec les différais types humains. La terre est divisée en grandes zones caractérisées par un ensemble de traits zoologiques et botaniques spéciaux. M. Agassiz cherche à prouver que les limites géographiques qui séparent ces grandes circonscriptions naturelles tracent également le domaine des différentes races humaines. Des raisonnemens qu’il nous paraît superflu de discuter en détail l’amènent à cette conclusion : « La coïncidence entre la circonscription des races humaines et les limites naturelles des diverses provinces zoologiques caractérisées par des espèces différentes d’animaux est un fait qui ne peut manquer de jeter du jour, dans quelque période future, sur l’origine même des différences qui existent entre les hommes, puisqu’il montre que la nature physique de l’homme est modifiée par les mêmes lois que celle des animaux, et que les résultats généraux obtenus dans le règne animal relativement aux différences organiques des divers types doivent aussi s’appliquer à l’homme. Nous n’avons donc aujourd’hui à choisir qu’entre deux alternatives : où bien toute l’humanité provient d’une souche commune, et toutes les différentes races, avec les particularités qu’elles présentent dans leur distribution actuelle, doivent être attribuées à des changemens subséquens, présomption en faveur de laquelle on ne peut fournir aucune