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assez large pour donner passage aux bâtimens de toute dimension qui peuvent être employés à la navigation fluviale ; d’installer à l’endroit de cette prise d’eau, c’est-à-dire à Atfeh, un service de pompes à feu au moyen duquel le niveau du canal Mahmoudieh sera toujours maintenu à l’élévation nécessaire ; d’entretenir le fond du canal en état permanent de curage par l’emploi de dragues ; de livrer en tout temps gratuitement assez d’eau aux propriétaires riverains pour maintenir en bon état d’exploitation la zone des terres actuellement cultivées sur les deux bords, et de mettre en outre, moyennant rétribution, à la disposition des mêmes propriétaires l’eau qu’ils voudraient utiliser pour étendre leurs cultures au-delà des limites présentes. Enfin les concessionnaires se sont obligés à fournir au prix de revient, sans aucun bénéfice, l’eau nécessaire à l’alimentation des nouvelles fontaines que le gouvernement jugerait à propos d’établir à Alexandrie. De plus, on a réservé à la compagnie la faculté de construire une écluse à Alexandrie, à l’embouchure du Mahmoudieh. Si ce dernier projet est mis à exécution, les barques venant de l’intérieur pourront passer du canal dans le port et accoster les navires sans rompre charge.

Ainsi la création de la compagnie de remorquage assure l’approvisionnement d’Alexandrie, l’assainissement de cette ville, la promptitude et la régularité des arrivages attendus par le commerce, une économie considérable dans les frais de transport des denrées, la fertilité de terres restées en friche. La concession de ce privilège n’en a pas moins été l’objet d’une protestation assez singulière. Un sujet prussien résidant en Égypte eut l’idée de faire pour son compte le remorquage à vapeur après la formation de la compagnie privilégiée. Il prit l’avis de son consul, M. de Pentz, qui lui donna carte blanche, jugeant sans doute que le vice-roi n’avait pas le droit d’accorder une concession telle que celle du remorquage à vapeur sans avoir obtenu l’assentiment de son suzerain. Le spéculateur prussien envoya donc à l’embouchure du Mahmoudieh deux bateaux à vapeur qui prirent à la remorque une flottille de barques chargées de marchandises et les amenèrent triomphans à Alexandrie. Cette audacieuse tentative ne pouvait pas être renouvelée, et le gouvernement égyptien interdit au sujet prussien de poursuivre son entreprise. Il s’ensuivit une protestation du consul de Prusse, menaçant, de soumettre le différend à la Sublime-Porte, protestation qui devait rester et qui resta sans effet, car elle ne tendait à rien moins qu’à mettre en doute l’autorité que le vice-roi tient des traités internationaux, et qui découle du caractère même de son pouvoir héréditaire. Le projet d’une entreprise de halage sur les canaux qui sillonnent l’Égypte, projet d’ailleurs abandonné, souleva aussi une protestation de l’Angleterre,