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bien ! ce n’est pas tout, des couches de coquilles marines s’entassent au-dessus de cette dernière terrasse, et parmi elles il en est qui ne vivent plus le long des côtes de l’Angleterre. Ces dépôts sont ou contemporains de l’époque glaciale ou postérieurs. Sur ce nouveau théâtre de faits, nous découvrons donc la trace de ce qui s’est passé depuis le bouleversement des climats. Tout indique ici une époque, ou mieux une succession d’époques durant lesquelles la Grande-Bretagne, en partie noyée dans un déluge de glace, reparut et recouvra par degrés une température plus douce, quoique non égale à celle des anciens âges. À mesure que la terre immergée se relève, nous ne retrouvons presque plus les formes de la vie analogues à celles des contrées tropicales. C’est alors l’élan irlandais, irish elk, célèbre par l’envergure de ses cornes palmées, bois vivant qui courait dans l’épaisseur des grands bois ; c’est le cheval ; ce sont les souches de nos animaux domestiques qui reposent le plus souvent dans le lit, aujourd’hui desséché, des anciens lacs d’eau douce. Au moment où l’homme va naître, où il est peut-être déjà né sur quelque plateau de l’Asie centrale, la nature vivante laisse tomber dans les îles britanniques ces formes gigantesques et terribles de l’ancien monde. De nouvelles espèces de plantes ou d’animaux viennent successivement remplacer les vides laissés par la destruction de l’ancienne flore et de la faune aux traits désormais exotiques. Il est naturel de se demander où cette création d’espèces végétales et animales s’est arrêtée ; la science anglaise répond : nulle part. Parmi l’assemblage de choses qui croissent, vivent, meurent et se reproduisent à la surface actuelle de la Grande-Bretagne, les unes ont précédé l’époque glaciale, d’autres sont nées durant cette longue inondation partielle ; d’autres enfin ont commencé avec l’élévation croissante des terres, qui sortaient rajeunies, du sein de l’abîme.

Ces grands changemens ne sont pas les derniers qu’ait subis la figure géographique de l’Angleterre, de l’Ecosse et de l’Irlande. Depuis les temps plus ou moins historiques, des lacs se sont comblés ou ont diminué d’étendue par le fait seul des sédimens que déposent les eaux et par les débris de coquilles dont leur lit se remplit en s’élevant. Tous les puissans fleuves de la Grande-Bretagne ont formé le long de leurs rives, mais surtout à leur embouchure, des terres nouvelles, où croissent les meilleurs pâturages, où broutent les bêtes à cornes, et qui nourrissent pendant plusieurs années des moissons de blé successives sans s’appauvrir. Un autre genre de dépôt est en voie de progrès sur les côtes des îles britanniques : il consiste en sable et en cailloux que jette la mer, qui interrompent la navigation, forment des chaînes de dunes, et ensevelissent des églises, des maisons. Dans certains endroits, ce sable est composé