sèdent plusieurs d’un vrai mérite; mais aucun ne m’a semblé du premier ordre, et, chose étrange, ceux de Paul Véronèse ne sont ni très nombreux, ni des meilleurs. Ses fresques, dont quelques-unes couvraient des murs extérieurs, ont été à peu près détruites.
Je n’ai pas vu le tombeau de Juliette, ou du moins la cuve en pierre rougeâtre qu’on montre dans un jardin, et qui doit sa réputation à une ouverture pratiquée, à ce qu’on suppose, pour que la jeune fille endormie pût respirer dans son cercueil. C’est pour plaire aux touristes anglais qu’on a imaginé cette antiquité. J’aimais mieux chercher dans les rues de Vérone le lieu probable du duel de Tybalt et de Mercutio, ou le palais des Capulet et le jardin où chantait l’alouette. C’est surtout à la vue d’une de ces maisons sans fenêtre au rez-de-chaussée, et dont le premier étage porte des balcons travaillés en arabesques, que je croyais entendre une voix me dire :
Vieni a veder Montecchi e Cappelletti[1].
Mais où ne nous conduirait pas, dans une ville aussi riche en souvenirs que Vérone, la recherche des traces du passé? J’en laisse le soin à de plus habiles, et j’engage seulement les curieux à repasser l’Adige et à se faire conduire au palais Giusti. La maison n’a pas fort grande apparence. Après un coup d’œil donné à quelques débris d’antiquités, il faut entrer dans les jardins et gravir la pente assez raide sur laquelle ils sont plantés. Ce sont jardins à l’italienne, avec terrasses superposées, grottes en rocailles, et cyprès gigantesques qu’on prétend trois ou quatre fois séculaires. Par une rampe en lacet, on monte à un pavillon d’où se découvrent dans leur magnificence Vérone et ses environs. Au soleil couchant, cette vue est d’un effet extraordinaire.
Vicence, qui vient après Vérone, est la ville de l’architecture. Il faudrait des connaissances positives pour en parler d’une manière vraiment intéressante. Déjà à Vérone nous avons été obligé de passer sous silence nombre de beautés ou de curiosités monumentales; nous n’avons pas même nommé un homme de génie, qui a rempli cette ville de ses travaux, Sanmicheli, un de ces artistes signalés, comme on l’était souvent au XVIe siècle, par la diversité autant que par la distinction des talens. Fortifications, églises, palais, restaurations de tous les genres et de toutes les époques, il n’est rien que Sanmicheli n’ait tenté, et qu’il n’ait accompli avec supériorité. C’était Vauban, Riquet, Perrault tout ensemble, un de ces hommes
- ↑ Purgat., VI, 106.