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septentrionales on ne peut guère compter, même pendant la saison la plus favorable, sur plus de dix ou douze jours de-beau temps continu; il importait donc de terminer l’opération avec la plus grande célérité possible. Pour en hâter les progrès, on avait d’abord songé à envoyer les deux navires au centre de l’Atlantique : on y eût soudé les extrémités des câbles dont ils étaient chargés. Cela fait, l’un des navires aurait fait voile pour l’Irlande, l’autre pour Terre-Neuve, et le câble, une fois descendu au milieu de l’Océan, se fût étendu dans les deux sens à la fois. De cette façon, on pouvait terminer l’opération deux fois plus vite qu’en immergeant d’abord la moitié du câble à partir de l’Irlande, puis l’autre moitié en avançant vers Terre-Neuve. De plus, en allant dès le début au milieu de l’Océan, on se plaçait tout de suite dans les circonstances les plus critiques, l’on mettait le mieux à l’essai la force de résistance du câble, et s’il devait se briser, on ne risquait que d’en perdre une faible longueur. Ajoutons qu’il était très facile de souder les deux moitiés du câble, tant qu’elles étaient encore chargées sur les navires, mais que cette opération devait présenter de réelles difficultés, surtout par un gros temps, si l’une d’elles était déjà immergée. Pour tous ces motifs, on avait d’abord décidé que l’immersion commencerait au milieu de l’Atlantique. Cette résolution fut ensuite abandonnée, et l’on préféra faire naviguer de conserve les deux bâtimens chargés du câble avec les steamers qui devaient leur prêter appui, afin de concentrer toutes les forces et les ressources de l’escadre.

Le 29 juillet 1857, le Niagara entra dans le port de Queenstown, accompagné du Susquehanna, un des plus rapides bâtimens à vapeur de la marine des États-Unis : l’Agamemnon était déjà au rendez-vous avec le Léopard et le Cyclope, qui avait opéré les derniers sondages dans l’Océan. On vit bientôt arriver M. Bright, l’ingénieur en chef de la compagnie, M. Whitehouse, M. Morse, M. Cyrus Field, un des plus ardens promoteurs du télégraphe atlantique, le savant professeur Thomson, qui par ses conseils avait tant contribué à résoudre les problèmes scientifiques dont la solution importait au succès et à l’avenir de l’entreprise.

Le o août, le lord-lieutenant d’Irlande, en présence d’une foule immense, inaugura l’immersion du câble sous-marin dans la paisible baie de Valentia, qu’on avait choisie comme un des termes de la ligne, parce que très peu de vaisseaux viennent y jeter l’ancre. L’extrémité du câble fut amenée par des bateaux sur la rive, et lord Carlisle la relia à une forte pile qui, pendant l’opération, devait établir une communication permanente avec les navires. En cas de réussite, il était convenu que les premières dépêches entre les deux continens seraient directement échangées entre la reine Victoria et M. Buchanan, président des États-Unis.