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LES
BEAUX-ARTS
EN ANGLETERRE


L’Angleterre est demeurée pendant longtemps fort en arrière des autres pays de l’Europe pour la culture des beaux-arts. Le gouvernement ne s’en occupait point ; l’aristocratie, formant à grands frais des collections de chefs-d’œuvre étrangers, avait assez de goût ou assez de prudence pour n’y pas placer les productions de ses compatriotes. Quant à la masse de la nation, elle n’avait nul souci de jouissances qu’elle sentait hors de sa portée, et que dans un orgueil caractéristique elle confondait volontiers avec les inutiles frivolités du continent. « Payez les arts, ne les cultivez pas, » disait lord Chesterfield à son fils. Le petit nombre d’artistes qui, par vocation ou par entêtement, luttaient contre tant d’obstacles, n’avaient guère d’autres ressources que de faire des portraits, et c’est en effet le seul genre qui ait été cultivé en Angleterre avec un succès marqué.

Deux hommes ont fondé la renommée de l’école anglaise, sir Joshua Reynolds et sir Thomas Lawrence, qui pour la peinture de portrait ne reconnaissent guère de supérieurs. À l’exemple de Van-Dyck et de Velázquez, ils ont excellé à exprimer le caractère et l’individualité de leurs modèles. Tel est à mes yeux leur véritable mérite. Ils en ont d’autres encore, mais plus contestables, une couleur harmonieuse et la science du clair-obscur. On accorde beaucoup de licences aux coloristes. Reynolds et Lawrence en usèrent largement, et pour arriver à ce qu’on appelle l’effet, ils se mirent