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quences d’un haut intérêt pour l’agriculture et l’industrie manufacturière. Je crois devoir reproduire ces observations, appuyées sur des recherches expérimentales, et montrer quels en ont été les résultats pratiques. Je ne m’écarte pas ainsi de mon sujet, car les destinées de l’industrie sucrière indigène restent étroitement liées à l’emploi du noir animal.

J’avais établi un premier fait : « Le charbon d’os s’empare de la chaux dissoute dans les solutions sucrées au point que les réactifs les plus sensibles, l’acide oxalique notamment, n’en accusent plus la présence. »

Cette propriété, éminemment utile, a déterminé et motive encore la préférence accordée au noir animal par les fabricans de sucre sur les autres agens de décoloration qui ne la possèdent pas. Et lors même que, suivant un nouveau et très remarquable procédé, on sature et l’on élimine la chaux employée en excès par un courant de gaz acide carbonique, la filtration au travers du noir animal demeure très favorable au succès de l’opération, car elle enlève aux jus et sirops, outre la matière colorante, plusieurs substances organiques étrangères qui se seraient opposées à la cristallisation du sucre. Cette observation bien constatée conduisit à rechercher si plusieurs sels calcaires ne seraient pas éliminés de même de leurs solutions aqueuses, et à découvrir un moyen, que Robiquet a fait connaître, d’épurer certaines eaux potables. On est allé plus loin encore dans la même direction, et l’on a découvert la propriété singulière que possède aussi le charbon d’os, de fixer plusieurs oxydes métalliques et d’enlever aux solutions aqueuses de ces oxydes certains principes immédiats que l’alcool peut ensuite reprendre au charbon. L’analyse organique elle-même a profité de ces notions importantes, et les chimistes ont été avertis qu’en employant dans la recherche des poisons le noir animal pour décolorer les liquides, ils s’exposeraient à faire disparaître avec l’agent toxique la preuve du crime. Une pareille erreur n’est d’ailleurs pas restée sans exemple : commise par des manipulateurs inexpérimentés, elle n’a été reconnue qu’après un nouvel examen par des expérimentateurs mieux au courant de la science, appelés ensuite à l’honorable et délicate mission d’éclairer la justice dans ces graves circonstances.

Le deuxième fait constaté est celui-ci : « La propriété spéciale du charbon d’os peut être appréciée au décolorimètre, si l’on augmente l’épaisseur de la couche du liquide décoloré jusqu’à ce que la nuance en soit égale à celle du même liquide d’épreuve avant sa filtration au travers du noir. »

Il est évident que plus la couche devra être épaissie pour arriver à l’égalité de nuance, plus la décoloration aura été forte, car, pour