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une très forte somme, et les obligations des chemins de fer, sans parler des dettes des autres compagnies, montent extrêmement haut.

À cette liste des personnes qui éprouveraient un grand préjudice, il faut joindre tous les fonctionnaires retraités dont la pension aurait été liquidée antérieurement et tous ceux qui le seraient jusqu’à ce qu’une loi nouvelle eût élevé le taux des pensions, toutes les personnes qui auraient prêté sur hypothèques à longue échéance, tous ceux qui vivraient sur des redevances à longue durée, les particuliers ou les sociétés comme celle du crédit foncier qui recevraient des annuités en remboursement de capitaux prêtés, ceux qui auraient placé leur bien en viager, tous les propriétaires qui auraient contracté des baux à long terme. En pareille occurrence, et jusqu’à ce que le métal eût repris une valeur stable, le bail à long terme, que recommandent les agronomes, serait un fléau pour le propriétaire.

Il conviendrait même d’assimiler jusqu’à un certain point à cette catégorie l’innombrable multitude des fonctionnaires civils et militaires, non qu’il leur fût interdit en pareil cas d’espérer une augmentation de traitement : il est plus que vraisemblable qu’ils l’obtiendraient ; mais il est dans l’ordre des choses que les augmentations de ce genre se fassent longtemps attendre. On en a la preuve par ce qui se passe à l’égard de beaucoup de fonctionnaires, de ceux-là même qu’entoure le plus l’estime publique, de la magistrature par exemple. Voici bien des années qu’on lui annonce toujours pour le lendemain l’élévation de son salaire, et ce lendemain est toujours à venir. La position pénible et presque humiliante de solliciteur réclamant un traitement plus fort serait à subir plusieurs fois, et presque coup sur coup, par les fonctionnaires, parce que, la force qui doit déprimer la valeur de l’or n’agissant que successivement, ce serait par trois ou quatre degrés intermédiaires laborieusement gravis qu’ils auraient à passer avant que leurs appointemens fussent parvenus à leur taux normal. Pour eux donc, ce serait un tourment continuel ; à chaque instant, ils se verraient menacés de n’avoir pas des moyens suffisans d’existence pour leur famille, et il est permis de croire que l’administration des affaires du pays se ressentirait de cette triste situation morale et matérielle des serviteurs de l’état.

Toutes les professions libérales, comme le barreau, la médecine, les professeurs en tout genre, les ingénieurs, les architectes et une foule d’agens de toute sorte auraient de même à augmenter, à plusieurs reprises, le montant de leurs honoraires, ce qui ébranlerait souvent leur position, qu’ils auraient cru assurée.

Pour les populations ouvrières, ce serait une suite d’épreuves très