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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 12.djvu/190

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Les feuilles et les troncs, séparés par l’action des eaux, se rencontrent au milieu des couches, et d’ordinaire dans la direction des plans de stratifications ; mais quelquefois aussi, ce qui est fort remarquable, des végétaux plus ou moins complets y sont debout dans une position perpendiculaire à ces plans, et sont les témoins irrécusables d’un ensablement opéré sur place par les matériaux sédimentaires. On a maintes fois cité le fait, — devenu classique après que le savant Al. Brongniart l’eût révélé il y a une trentaine d’années, — d’une carrière de grès houiller des environs de Saint-Étienne offrant aux yeux de l’observateur, dans une planche naturelle de stratigraphie ; un grand nombre d’arbres fossiles verticalement encastrés dans une couche de 6 mètres de puissance. Le fait n’est d’ailleurs point isolé ; on en trouve notamment de remarquables exemples aux mines d’Anzin et dans une exploitation du bassin de Sarrebruck, où les troncs ont été soigneusement conservés en place.

Probablement creux ou pleins seulement d’une moelle légère, ces grands végétaux ont été remplis intérieurement par la roche encaissante ; ils en sont séparés par une écorce houillère de quelques millimètres, tellement peu adhérente à la roche que l’arbre tombe dès qu’il est privé de point d’appui ; Cette écorce, née de la substance organique de la tige, en garde encore le caractère, et porte même les traces des points d’attache des branches. Ce phénomène intéressant rend évidemment : admissible l’hypothèse de la formation des couches de houille par l’entassement de végétaux enfouis encore humides, pressés, desséchés et finalement minéralisés en masse compacte.

Il ne reste plus alors qu’à expliquer cette accumulation des végétaux ainsi carbonisés. Après avoir vainement essayé d’attribuer pour cause à ce phénomène une action des eaux qui aurait transporté les masses houillères, ou une carbonisation d’immenses forêts surmontant des marécages[1], on en est arrivé à reconnaître, dans l’accumulation des matières végétales formant les couches de houille, les traces d’une végétation aquatique et herbacée, purement locale. Cette hypothèse emprunte même une sorte de sanction à ce fait ; que, si dans une houille pure la décomposition originaire n’a laissé naturellement aucune trace de forme des végétaux constituans, la houille rendue impure par un mélange avec les dépôts sédimentaires porte quelques vestiges de végétaux précisément très petits.

  1. M. Élite de Beaumont a ruiné ces deux systèmes en les soumettant à d’ingénieux : calculs. « Une futaie de la plus belle venue possible, écrivait notamment cet illustre géologue en 1842, qui couvrirait la France entière, serait loin de contenir autant de carbone qu’une couche, de houille, de 2 mètres d’épaisseur étendue dans les seuls bassins houillers connus.