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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 12.djvu/857

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sur leurs traces, à devenir inventeurs à notre tour. En reconnaissant combien de faits jugés d’abord inutiles ou sans portée ont joué plus tard un rôle important lorsqu’ils ont été mieux compris, on se sent pénétré d’un juste respect pour les travaux d’autrui, alors même qu’ils ne semblent pas présenter d’emblée une haute valeur. M. Edwards, parlant à un jeune auditoire, cherchant à former des investigateurs qui pussent à leur tour reculer les bornes de notre savoir, a dû suivre depuis longtemps dans ses cours la méthode historique ; il l’a conservée dans ses Leçons, et l’on ne peut qu’applaudir à son choix. Sans doute il ne s’est pas cru obligé de faire l’histoire complète des erreurs de ses devanciers : il s’est borné à suivre la science dans ses conquêtes réelles, à montrer la liaison qui existe entre chacun de ces grands résultats, à constater que chaque découverte nouvelle n’est le plus souvent que la conséquence logique des découvertes précédentes. Le lecteur le plus novice est ainsi préparé à juger sainement les hommes et les choses en même temps qu’il est initié aux procédés suivis par l’intelligence humaine dans la recherche de la vérité.

Les Leçons de physiologie et d’anatomie formeront, on peut déjà l’assurer, un ouvrage très considérable. Les deux premiers volumes ne renferment encore que l’histoire du sang avec l’étude physiologique et anatomique de la respiration. Il est facile de juger par là de l’étendue du cadre embrassé par M. Edwards. À part tout autre mérite, on ne trouverait nulle part aujourd’hui une réunion aussi complète de documens de tout genre : travaux anatomiques ou physiologiques, ouvrages généraux ou monographies, auteurs français ou étrangers, tout ce qu’a produit l’étude ancienne et moderne se trouve ou analysé ou signalé. Pour chaque fait, pour chaque opinion empruntée soit à ses propres recherches, soit à celles de ses confrères, l’auteur cite non pas seulement le titre du livre, mais le volume et la page, et en vérifiant quelques-unes de ces indications on reconnaît bien vite que M. Edwards n’a travaillé qu’avec les originaux en mains. La méthode suivie maintient toujours l’ordre le plus parfait au milieu de cette abondance de matériaux qui pouvaient si facilement devenir encombrans ; mais, pour bien apprécier ces mérites divers, il faudrait étudier l’ouvrage même, et nous terminerons par une dernière observation.

De tout temps, les physiciens et les chimistes surtout ont semblé se trouver à l’étroit dans leur savoir spécial ; de tout temps, ils ont tenté de sortir de l’étude des corps bruts et d’atteindre à celle des êtres vivans. Nous avons dit bien des fois ce qu’il fallait penser de cette tendance : elle est utile à la physiologie ; mais les résultats obtenus ainsi veulent être contrôlés. Or tel est rarement l’avis des savans