et dévoué à sa politique. Napoléon mit tout aussitôt sa fidélité à l’épreuve. La Prusse avait plusieurs belles divisions disponibles. Napoléon écrivit directement de Wilna (4 novembre) au roi, pour lui demander de remplacer deux régimens de cavalerie du corps d’York, qu’avaient perdu une partie de leur effectif, par deux régimens frais ; il émit en outre le vœu que la force du contingent pût être augmentée de 1,000 cavaliers et de 6,000 hommes d’infanterie. Frédéric-Guillaume accorda les deux régimens de cavalerie, mais refusa les 1,000 cavaliers et les 6,000 hommes d’infanterie. Il allégua l’impossibilité dans laquelle il était de faire de nouveaux sacrifices. « Toutes nos ressources sont épuisées, dit M. de Hardenberg au comte de Saint-Marsan, et nous ne pouvons plus concourir par aucun effort extraordinaire à la cause commune. » Les misères de la Prusse étaient effectivement à leur comble ; elles avaient atteint ce degré suprême qui ne laisse plus intacte ni debout aucune fortune, et où les souffrances privées viennent se confondre avec celles de l’état. La grande armée, dans son passage à travers le Brandebourg et la Vieille-Prusse, avait dévoré les dernières ressources de ces contrées sablonneuses et pauvres. La ruine était partout, dans les châteaux comme dans les chaumières, et le trésor public n’avait plus les moyens de subvenir aux dépenses les plus indispensables. Toutefois cette détresse financière n’était point un obstacle à la réalisation du désir de l’empereur. Les 7,000 hommes demandés étaient armés, équipés et rassemblés, et il ne s’agissait que de les diriger sur le Niémen ; aussi Napoléon insista. Le 14 décembre, il écrivit de Dresde au roi que, dans les circonstances présentes, il importait absolument que le contingent prussien constituât à lui seul un corps d’armée et pût être porté à un effectif de 30,000 hommes. « En demandant à votre majesté d’augmenter ses troupes, disait l’empereur, je vous prouve combien j’ai de confiance dans le système qu’elle a embrassé. » La lettre se terminait par des témoignages expressifs de félicitations pour le courage et la discipline qu’avaient montrés les troupes prussiennes pendant toute la campagne.
Cette lettre, remise au roi le 16 décembre, modifia ses premières décisions. Le lendemain 17, il reçut M. de Saint-Marsan et lui dit que la lettre de l’empereur l’avait extrêmement touché, qu’il était très sensible aux témoignages de confiance pour sa personne et de haute estime pour ses troupes dont elle était remplie, et il promit de faire ce que désirait l’empereur, autant toutefois, ajouta-t-il, que le lui permettrait la situation gênée de ses finances. Il insinua timidement que la France, ayant des garnisons nombreuses dans les places de l’Oder, devrait les en retirer, et que la Prusse se chargerait de les remplacer, ce qu’elle pourrait faire sans de trop grandes dépenses ; mais l’intention était trop claire pour n’être pas devinée, et d’une