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de Domitien. Tout le monde est d’accord sur la position de ce temple de la Concorde. Il n’en est pas de même du temple de Vespasien ; l’indication fournie par Stace démontre, ce me semble, évidemment qu’il faut le reconnaître dans les trois colonnes voisines du temple de la Concorde, et qu’on appelle encore quelquefois le temple de Jupiter tonnant, bien que ce temple ait été bâti par Auguste sur le Capitole, et non pas au pied du Capitole.

Je me suis un peu arrêté à ces vers de Stace sur la statue, équestre de Domitien, car ils sont décisifs pour qui veut s’orienter avec certitude dans la partie la plus intéressante de l’ancienne Rome. Je passe maintenant aux monumens élevés par Domitien et aux souvenirs historiques qui s’y rattachent.

Domitien était un grand bâtisseur. Il embellit Rome, il en élargit les rues. « O Germanicus (Martial l’appelle ainsi à cause de ses exploits en Germanie), tu as ordonné aux rues étroites de s’élargir, et ce qui était un sentier est devenu une voie. » Domitien améliora ce que nous appellerions la police de la voirie. Les petits marchands avaient envahi la voie publique : ce n’étaient partout que cabaretiers, cuisiniers, bouchers ; Rome semblait une grande boutique. Domitien fît disparaître ce désordre : cela était sensé. Ce qui l’était moins, c’était d’élever partout des arcs avec des quadriges et des trophées, toujours par suite de ses goûts de triomphateur. Il remplissait aussi la ville de nombreux Janus. Ceux-ci avaient une destination plus pacifique : c’étaient des édifices ouverts et voûtés ; ceux du Forum, autour desquels on se rassemblait pour faire les marchés d’argent, pour prêter et emprunter, étaient célèbres ; ils tenaient lieu de bourse. Celui du Marché-aux-Bœufs se voit encore à Rome. Domitien avait construit une si grande quantité de ces Janus, qu’un plaisant écrivit un jour en grec sur l’un d’eux : « C’est assez. »

Le frère de Titus fit une chose plus utile en réparant la voie Appienne. La portion de cette voie qu’on trouvait après les Marais-Pontinïs était en très mauvais état. Sénèque, que la mer avait effrayé, regrettait d’avoir pris la route de terre, et disait qu’en la suivant il lui semblait avoir navigué. En effet, il avait pu retrouver les ennuis de la traversée et jusqu’au mal de mer sur une telle route, car, comme nous l’apprend Martial, « les roues y enfonçaient dans la boue, le Vulturne qui l’inondait forçait à faire un long détour ; le voyageur, cahoté, était comme en croix, et au milieu des champs latins il éprouvait les inconvéniens d’une navigation. — Maintenant, ajoute-t-il, ce qui prenait un jour tout entier se fait en deux heures. » Et dans son admiration pour cette œuvre de Domitien il s’écrie que sur ce chemin on pourra désormais égaler la vitesse des oiseaux.