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Ainsi, dans une année pendant laquelle les actionnaires auront touché 12 millions, l’état, soit en argent, soit en services rendus qu’il lui aurait fallu payer, aura touché 4 millions, c’est-à-dire le quart de tout le produit net. En d’autres termes, il aura eu pour sa part 13 fr. 33 cent, par chaque action, tandis que l’actionnaire aura touché 40 fr. Et si l’on ajoute 1,024,000 fr. payés par les voyageurs et le trafic de grande vitesse, l’état aura retiré de cette grande entreprise

3,075,532 fr. en argent,
1,953,000 fr. en services rendus,
Total 5,028,535 fr.

On voit tout ce qu’il y a d’erroné dans cette pensée, que les entreprises de chemins de fer ne sont soumises à aucune sorte d’impôts. Elles en supportent au contraire de considérables ; seulement, comme ces impôts sont nécessairement prélevés avant la distribution des dividendes, les hommes qui n’examinent pas sérieusement les choses s’imaginent que les capitaux engagés dans ces entreprises ne paient pas leur part de tribut. C’est absolument comme si l’on disait à un propriétaire qu’on verrait toucher le prix d’un fermage qu’il n’a aucune charge à supporter, parce que ce fermage arrive dans ses mains déduction faite de tout ce qui a grevé la terre et l’agriculture.

Enfin, et nous terminerons sur ce point par cette considération : l’impôt direct sur une valeur, sur une propriété quelconque, a pour effet immédiat d’enlever au possesseur de cette propriété, au moment de l’établissement de l’impôt, une partie du capital, laquelle est exactement le montant du chiffre même de l’impôt capitalisé d’après le taux de l’intérêt du placement. Et c’est pour cela que les lois d’impôts directs doivent être en quelque sorte immuables et dans la répartition et dans le chiffre.

Ainsi, sur une action dont le dividende donnera par exemple 50 francs et qui sera cotée à la Bourse à 5 pour 100, 1,000 francs, établir un impôt d’un dixième, c’est-à-dire de 5 francs, c’est absolument comme si l’on enlevait le dixième du capital, autrement dit 100 francs, au porteur de l’action au moment de l’établissement de l’impôt. L’impôt en effet n’ayant pas évidemment pour conséquence défaire baisser le taux de l’intérêt, et 5 pour 100 étant dans l’exemple choisi l’intérêt qu’exigent les capitaux pour entrer dans l’entreprise, il en résulte que les acquéreurs qui viendront après l’établissement de l’impôt ne donneront plus de l’action que 900 francs, au