Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 8.djvu/459

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fait aux deux grandes puissances de l’Occident et au royaume de Naples une situation où les gouvernemens ne peuvent rester et d’où ils ne peuvent sortir ; on s’efforçait de découvrir des symptômes meilleurs, lorsque tout à coup a éclaté entre l’Autriche et le Piémont, cette guerre nouvelle qui a commencé par des polémiques de journaux, et qui vient, de continuer par un échange de notes diplomatiques dont nous laissions l’autre jour pressentir le sens au moment où elles étaient livrées à la publicité européenne. M. de Buol rassemble tous les sujets de plainte de l’Autriche, langage acerbe des journaux piémontais, manifestations des autres montrées de l’Italie en faveur du gouvernement de Turin, c’est-à-dire contre le gouvernement impérial, souscriptions pour les cent canons destinés à l’armement de la forteresse d’Alexandrie, don des Milanais pour l’érection d’un monument à l’armée sarde. Tous ces griefs sont soigneusement réunis et résumés avec une certaine raideur dans la note que le chargé d’affaires impérial à Turin, le comte de Paar, a reçu la mission de communiquer à M. de Cavour. Le président du conseil du roi Victor-Emmanuel, usant à son tour du même procédé, a chargé ragent piémontais à Vienne, le marquis Cantono, de lire à M. de Buol la réponse qu’il a faite à sa communication. La note de M. de Cavour a eu un succès qu’on ne saurait contester ; elle a paru l’œuvre d’un esprit habile, qui sait être modéré quand il le veut sans cesser d’être ferme, et qui n’est jamais plus fort que lorsqu’il est sur son vrai terrain, celui d’une politique dégagée de toutes les exagérations des partis. La politique exposée dans la note piémontaise est une politique dévouée sans doute à l’indépendance de l’Italie et aux idées libérales, mais en même temps décidée à respecter les traitée à ne s’affranchir d’aucune des obligations du droit public, et à n’aller au-devant d’aucune rupture systématique. C’est ce qui la distingue de toutes les politiques insurrectionnelles et révolutionnaires. Dans ces termes mêmes, les réfutations opposées par M. de Cavour à M. le comte de Buol ne laissent pas d’être embarrassantes pour le gouvernement impérial. Pourquoi l’Autriche ferait-elle un crime au cabinet de Turin du langage de la presse sarde, lorsque la législation en vigueur dans le Piémont met à sa disposition des moyens répressifs dont elle n’use pas ? Pourquoi même s’en plaindre à la rigueur, puisque les journaux piémontais ne passent pas le Tessin, et que leur influence se trouve ainsi préventivement annulée dans les possessions de l’Autriche ? Les journaux sardes sont souvent violens, cela n’est point douteux ; les journaux autrichiens ne l’ont pas été moins dans ces derniers temps, ainsi que nous le disions récemment, et il y a ceci à considérer, que rien ne s’écrit dans l’empire d’Autriche qui n’ait l’autorisation directe ou indirecte du gouvernement. Au pis aller, c’est une querelle de journaux, dont l’importance diminue à mesure que les cabinets s’en occupent moins. Il y avait un passage plus délicat dans ces confidences diplomatiques. Des manifestations ont eu lieu dans diverses contrées de l’Italie pour honorer l’initiative que le gouvernement piémontais a prise l’an dernier au sujet de la péninsule : le cabinet de Vienne a pu être secrètement blessé, et il met aujourd’hui sa blessure à nu ; mais ici encore, pourquoi l’Autriche cherche-t-elle absolument à voir une hostilité dans ces manifestations, puisqu’elle s’est évidemment inspirée de la poétique recommandée par le congrès de Paris dans les actes récens qui ont signalé le pas-