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la termine, de l’autre apparaître, ainsi qu’une montagne de plus, le dôme de Saint-Pierre, la seule des œuvres de l’homme qui ait quelque chose de la grandeur des œuvres de Dieu.

Redescendons dans l’intérieur des thermes de Caracalla, étudions-en les diverses parties, et cherchons à nous faire une idée vraie de ces thermes des Romains, sorte de monumens qui leur fut propre, et qui, en dépit du nom qu’ils portent, n’étaient pas seulement des bains chauds.

Les thermes romains eurent pour type le gymnase et la palestre des Grecs, c’est-à-dire les lieux où l’on se livrait aux exercices corporels. Dion Cassius, qui écrit en grec, désigne les thermes par le mot gymnasion. En Grèce, dans les gymnases, il y avait un bassin d’eau froide et des bains d’eau chaude ; tout cela était subordonné à l’objet principal, la lutte, destinée à développer la force et la beauté. Après ces exercices violens, on avait besoin de se reposer et de se récréer par le bain et la promenade. Les jardins, les portiques se trouvaient aussi dans les gymnases romains, c’est-à-dire dans les thermes. Seulement le bain, qui en Grèce était l’accessoire, devint à Rome le principal, et donna son nom à tout l’établissement ; mais la palestre ne fut pas oubliée, et figure dans les thermes de Dioclétien aussi bien que dans ceux de Caracalla. Les thermes renfermaient aussi des objets d’art, comme nos musées. On y trouvait des salles de conversation et de lecture, des bibliothèques, des emplacemens pour les jeux de balle et de ballon, en un mot tout ce qui est nécessaire à l’amusement d’un peuple civilisé. C’était, sur une vaste échelle, ce que sont en petit nos cercles et nos clubs, où il y a de même des salles de lecture et de conversation, où l’on joue, sinon à la balle et au ballon, au whist et au billard. Les poètes y venaient lire leurs vers, et Martial se plaint de ceux qui l’y poursuivaient. Les inventeurs d’un divertissement nouveau y apportaient leurs inventions. Martial parle aussi d’un certain Ursus Togatus, qui allait, dans les différens thermes de Rome, montrant l’essai d’une balle de verre. Les thermes se fermaient au coucher du soleil ; une cloche avertissait que l’heure de la clôture était arrivée. Alexandre Sévère fut le premier qui les éclaira toute la nuit.

La passion des Romains pour le plaisir du bain donna un grand développement à cette destination partielle et, dans l’origine, secondaire des thermes. On eut, dans tous, des bains froids, des bains chauds et des bains de vapeur. Les thermes prirent, sous les empereurs, des proportions immenses : Caracalla établit dans les siens seize cents sièges de marbre pour les baigneurs, et on voit encore les restes d’un aqueduc dont le seul objet était de fournir à ceux-ci l’eau dont ils avaient besoin.