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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 9.djvu/607

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Ce traitement, on le voit, est facile à saisir. Il est simple, rationnel, trop simple peut-être pour satisfaire les malades, qui ne veulent pas toujours se contenter de remèdes ordinaires.

Le choléra est transmissible par l’air. Il n’est pas contagieux dans le sens rigoureux du mot, sans quoi les médecins en seraient tous atteints. Il a dans ses pérégrinations deux allures différentes : tantôt il va de proche en proche pour faire son tour du monde, tantôt il saute par-dessus des populations qui semblaient menacées, pour aller porter des coups imprévus en des endroits où on ne pouvait l’attendre. Dans ces derniers cas, il est probable qu’il a été importé; mais qu’il soit importé ou non, partout où préexistent des causes d’affinité, quelques précautions sanitaires que l’on prenne, il arrive fatalement; de même il se retire spontanément sans qu’on puisse dire pourquoi. Quand les circonstances favorables à son évolution n’existent pas, on peut l’importer sans danger; il ne se développe pas. Durant la guerre d’Orient, il n’y a pour ainsi dire pas eu de semaines que nous n’ayons apporté des cholériques par les bateaux à vapeur à Constantinople; cependant l’épidémie n’a pas sévi sur la population musulmane.

La douloureuse impression causée par l’expédition de la Dobrutcha ne tarda pas à s’effacer. L’armée allait s’embarquer pour la Crimée et entrer véritablement en campagne. Les combats et de nouvelles maladies allaient nécessiter la création de nombreux établissemens hospitaliers. De 1854 à 1856, dix-neuf hôpitaux français furent successivement installés à Constantinople, dans des bâtimens de quatre espèces différentes : casernes, hôpitaux turcs, palais, baraques en bois. Rappeler les circonstances qui ont amené la création de ces divers établissemens, ce sera noter aussi les époques les plus meurtrières de la campagne.


II.

Le 14 septembre 1854, les trois flottes alliées avaient débarqué sans combat sur le sol de la Crimée, à Oldfort, 137 bouches à feu, 61,200 hommes, dont 27,000 Français, un nombre égal d’Anglais et 6,000 Turcs. La victoire remportée le 20 septembre versa dans nos ambulances 1,033 blessés français et plusieurs centaines de Russes atteints par nos projectiles. Les uns et les autres furent, immédiatement après le premier pansement, transportés à bord des bâtimens de la flotte, et de là à Constantinople, où ils inaugurèrent le 24 septembre l’hôpital de Dolma-Baktché, situé à 500 mètres du Bosphore. Cet hôpital, presque exclusivement réservé aux blessés, comprenait deux corps de bâtimens isolés parfaitement distincts :