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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier 1858.

La politique a parfois d’indicibles tristesses. Depuis quelque temps, l’esprit de violence et de meurtre semblait assoupi ; il s’est réveillé tout à coup par une explosion terrible, par une de ces tentatives sinistres qui laissent une longue et profonde impression, tant par leur caractère que par leurs effets trop réels et par les conséquences plus graves, plus générales, qui auraient pu en sortir. L’autre jour, le soir du 14 janvier, l’empereur et l’impératrice, se rendant à l’Opéra, ont été assaillis presque au seuil du théâtre par une véritable tempête de fer. Des pièces explosives ont été lancées sous les voitures impériales, et en volant en mille éclats, elles sont allées faire des victimes de tous côtés, dans la foule, paisible spectatrice des apprêts d’une fête, dans les rangs de l’escorte, cruellement décimée, parmi les gardes de Paris, parmi les serviteurs du palais. L’empereur et l’impératrice seuls, objets de l’odieux attentat, ont été heureusement préservés, tandis qu’un aide-de-camp, le général Roguet, était blessé auprès d’eux. Un instant auparavant, tout était calme ; en quelques secondes, ces abords d’un théâtre étaient convertis en un lieu lugubre teint du sang des victimes et plein d’anxiété. Ainsi voilà des hommes qui peuvent concevoir et organiser de telles machinations : non-seulement ils les conçoivent contre le chef d’un grand pays, mais encore peu leur importe de frapper de toutes parts des femmes, des enfans, d’envelopper dans leurs tentatives de meurtre une jeune et gracieuse souveraine, pourvu qu’ils cherchent à assouvir leurs passions effrénées ! Des auteurs de l’attentat du 14 janvier, il n’y a rien à dire particulièrement, si ce n’est que d’après les premières indications ce sont des étrangers, des Italiens venus de Londres pour jeter la mort au milieu d’une foule française étonnée et stupéfaite ; le reste est du domaine de la justice.

Depuis ce moment, les manifestations se succèdent ; les corps de l’état, la magistrature, l’armée, les conseils locaux, les compagnies particulières, ont fait parvenir leurs adresses à l’empereur. Les souverains étrangers ont envoyé